Voilà maintenant plusieurs années que je me suis lancé dans cette série d’articles sur Star Wars. Pour les trois du fonds qui découvrent Le Grand Pop, sachez que nos colonnes soutiennent un édifice déjà bien solide sur la saga initiée par George Lucas à la fin des années 70. Cet article dédié à l'Épisode IX : L’Ascension de Skywalker est donc la fin d’un cycle.
Tout du moins si l’on en croit Disney, détenteur des droits. Mais en attendant un énième revirement de bord qui viendrait rendre caduque toutes les déclarations passées, et puisque les meilleures trilogies ne sont plus en trois épisodes, plongeons-nous une dernière fois dans une galaxie lointaine, très lointaine, histoire de mettre en point final à cette aventure débutée il y a bien longtemps.
Public Enemy
Avant de se lancer corps et âme dans le vif du sujet, faisons un petit point, voulez-vous. Pour rappel, le terme Prélogie désigne les Épisodes I, II et III, sortis entre 1999 et 2005, soit La Menace Fantôme, L'Attaque des Clones et La Revanche des Sith. Le terme trilogie ou trilogie originale regroupe les Épisodes IV, V et VI sortis entre 1977 et 1986, c'est-à-dire Un Nouvel Espoir, L'Empire contre-attaque et Le Retour du Jedi. Enfin, la Postlogie regroupe les Épisodes VII, VII et IX et réunit Le Réveil de la Force, Les Derniers Jedi et donc L'Ascension de Skywalker. Trois films sortis entre 2015 et 2019 et dont il sera beaucoup question ici.
Le cas de ce 9e Épisode de Star Wars est d'ailleurs unique. Le film est censé clore à la fois la trilogie de Disney, mais aussi le cycle complet et l’histoire de l’ensemble des films, et donc des deux trilogies précédentes. Un final qui se veut apothéose, mais il ne suffit pas de vouloir. Déjà sur le papier, c’est compliqué. Quel marketeux obscur a voulu cela ? Comment clore trois trilogies et 50 ans d’attente tandis que le dernier acte peine encore à se trouver ? Dans la maison Disney, les poutres se consument plus vite que la charpente de Notre Dame, et les errements internes de productions ont déjà balancé leurs flammèches jusqu’à nos salles obscures. C’est là notre drame.
Après les inepties disruptives de Rian Johnson sur l'Épisode VIII, rien ne va plus. La rupture est consommée, et plus personne ne s’écoute. Je ne reviendrai pas ici sur Les Derniers Jedi. Si le sujet vous intéresse, il a déjà été traité en longueur dans un précédent article. Mais ses conséquences piquent encore, comme une cicatrice qui peine à se refermer, transpirant encore le fiel et la condescendance des uns ou l’amertume acide et parfois outrancière des autres. Le film de Johnson a explosé la communauté des spectateurs en bouts épars, et depuis le désamour ou le désintérêt ont pris le dessus. La sortie d’un Star Wars n’est plus un événement. Ces films ne sont plus le projet d’un créateur, ils ne sont plus là parce qu’ils ont quelque chose à raconter, et ne sont plus que la décision de producteur de coller une date dans un planning – on saluera au passage Flegmatic qui a pointé cette vision après avoir dévoré le Podcast de No Ciné sur le sujet.
There and Back Again
Contrairement à ses déclarations passées, Kathleen Kennedy, responsable de Lucas Films, a décidé d’en finir avec les Skywalker. Les épisodes 7, 8 et 9, plus que les passeurs de relais pensés au départ, deviennent des épitaphes, astéroïdes informes flottant sur l’espace du doute. Le Réveil de la Force devait renouer avec la trilogie des années 70 – 80, et a pris soin de renier l’héritage de la Prélogie. Au final, le film est une redite creuse du premier film, copier/coller sans saveur qui réduit l’impact des actions des héros de toujours : quoi que Luke, Han et Leia aient pu faire dans les épisodes V ou VI, la situation est la même qu’au début de l'Épisode IV, mais comme il a fallu s’éloigner des enjeux politiques jugés trop complexes de la Prélogie, le spectateur est abandonné dans une nébuleuse de flou.
Qui ? Quand ? Comment ? Il faut que les nouvelles créations trans-médias (comics, jeux, romans, guides…) sortent de terre pour combler les vides, quand autrefois, l’Univers Étendu (tout ce qui n’est pas film ou série) venait seulement apporter des informations additionnelles… Malgré tout, Le Réveil de la Force initiait timidement de nouvelles choses, qu’en toute logique on verrait développées dans la suite, en vue d’une conclusion dans le dernier film. La base d’une trilogie. Mais non. Contre toute attente, Disney et Lucas Films ont laissé le réalisateur de l'Épisode VIII totalement libre. Libre de détruire 50 ans de mythologie, des personnages portés aux nues par des générations d’individus, et de cracher sur une héritage qui a fait de la saga ce qu’elle est aujourd’hui.
Protect me from what I want
Pourquoi cracher ainsi sur ce qui a coûté plus de 4 milliards à Disney ? Pourquoi l’acheter si c’est pour le mettre à sac de la sorte ? Si Johnson avait détruit et dépoussiéré Star Wars pour proposer quelque chose à la place, les voix des gardiens du temple se seraient sûrement élevées, mais le groupe aurait pu suivre. Quand j’entends les défenseurs de l’Épisode VIII crier au scandale parce que les fans sont toxiques et absolus, je me gausse.
En dehors de la minorité de petits fachos qui s’en sont pris à Kelly Marie Tran (Rose) ou à John Boyega pour sa couleur de peau, ce qu’il faut fermement condamner, je ne sais pas dans quel monde vous vivez, mais il ne me semble pas une seconde que vous trouviez un fan de Star Wars qui aurait souhaité d’une trilogie qui mime l’ancienne, vautrée dans la nostalgie suintante, d’une trilogie sans nouvelle idée ni thème musical marquant, sans moment héroïque, sans combat spatial d’ampleur ou sans duel au sabre dantesque. Ne mélangeons pas les Black Blocs et les manifestants s’il-vous-plaît. La plupart des critiques que j’ai lues ou vues pointent des errements de scénario impardonnables et une réécriture abjecte de l’histoire ou des personnages avec vissé au corps l’absolue conviction d’être progressiste parce qu’on brûlait des idoles…
Jetez la chape de vertu boursouflée qui aveugle vos esprits de Tartuffe et la posture de bien-pensance facile dans laquelle vous vous drapez. Johnson n’a rien proposé. Star Wars n’avait pas besoin de chevalier blanc et ne vous a pas attendu pour proposer du métissage et des personnages féminins forts. Ils et elles sont là depuis presque 50 ans, sans sirop étalé. Il suffisait d’ouvrir les yeux. Non. Johnson n’a fait que déconstruire, engoncé dans son hubris, jouant avec la licence pour son plaisir personnel, à l’image de Chaplin jonglant avec la Terre dans le Dictateur. Il l’a dit en interview, c’était son rêve. Foutre le bordel dans une saga de première catégorie.
Car n’en déplaise aux fans de l’Épisode VIII qui se lustrent la nouille devant Mary-Sue, la mort du passé et les hésitations adolescentes d’un turlupin à la lippe molle, je le répète, Johnson ne propose rien, rushant même la fin de son film avec un rétropédalage incompréhensible qui remet la situation comme elle l’était au début, le manichéisme binaire en tête. Si la Postlogie s'essaye aux thèmes de l'apprentissage, de la transmission, de l'héritage, de de la destinée, de l'acceptation et de l'émancipation, non seulement elle le fait mal, mais en plus, ces thèmes ont déjà été abordés, et ne sont en rien novateurs. L’Épisode VIII ne sert à rien, il a juste tué le père, après avoir dansé sur son cadavre encore chaud, sans avoir seulement compris qui il était ou appris de celui-ci. Les larmes de Mark Hamill lors de la promotion du film ne sont pas gratuites.
Le combat des chefs
Et ce qui devait arriver arriva. Pardonnez-moi la formule. L'Épisode VIII a fait l’effet d’une bombe, et Disney paie encore aujourd’hui les soubresauts de ce schisme. Sorti à peine quelques mois après, le film Solo se viande au box office. S’il n’est pas un bon film et si on se demande encore l’intérêt de raconter la jeunesse d’Han Solo – lorsqu’on le rencontre dans A New Hope, le personnage vient tout juste d’amorcer sa trentaine —, le film n’est pas non plus une hérésie. Il est certes dispensable, mais ne mérite pas un tel échec et tant de moqueries. Il faut vraiment voir ce ratage comme la sanction d’un public encore échaudé par Les Derniers Jedi, et comme une conséquence de l’absence de maître à bord chez Disney et Lucasfilm.
Si déjà des ‘différences de vision créative’ ont tôt fait de germer du côté du studio, l’onde de choc de l’Épisode VIII aura fini par achever toute velléité créatrice. Renvois de scénaristes, de réalisateurs, rappels en urgence d’anciennes gloires et de bons élèves… En pleine apogée de sa trilogie, Disney pédale sévèrement dans la choucroute et l’accident industriel est à moins d’un parsec. Johnson a détruit tout ce que J.J. Abrams, réalisateur du Réveil de la Force, avait mis sur pieds dans l’Épisode VII, rompant tout logique avec un hors-sujet aberrant. Au début de l’Épisode VII, à la fin de l’Épisode VII, au début de l’Épisode VIII et à la fin de l’Épisode VIII, la situation est la même : le Premier Ordre étend son emprise sur la galaxie et les Rebelles sont au bord de l’extinction. Tout ça pour ça. Deux films pour rester au point mort, et plus qu’un film pour finir.
“Tu penses que tu vas y aller quand même ?
– Oui. Ça reste la fin. J’y vais sans y croire, et puis de toute façon, ça peut pas être pire que le 8.
– Moi je passe pour cette fois. Je ne vois pas ce qu’ils peuvent raconter de plus…
– Je ne sais pas. Après la bande-annonce reste enlevée. La musique est folle !
– Genre t’as pas levé les yeux au ciel quand tu as vu des chevaux sur le pont d’un vaisseau ?
– Si bien sûr. Mais j’ai envie d’y croire. Ils disent que ça doit signer la fin des 9 films, pas que de la trilogie Disney. T’imagines s’ils font revenir Anakin ? Y a bien l’Empereur qui revient !
– Je veux bien, mais il revient comment ? Genre pendant 30 ans il était caché ? Et il a survécu comment de sa chute là ?
– Je sais pas. On verra bien.
– Vous y allez ensemble ?
– Pas sûr. Même le grand il joue plus avec Iron Man qu’avec ses figurines de Vador et d’Obi-Wan…”
Gomme Pressée
Mais revenons au présent et à l’Épisode IX : The Rise of Skywalker. Rappelé en urgence pour clore le bouzin, Abrams allait devoir s’armer de courage et d’inventivité. Il rappelle George Lucas comme consultant, et se lance dans un rafistolage en règle, en essayant tant bien que mal de recoller les wagons. Mais encore une fois, les choses ne se passeront pas comme on l’espérait : Disney décide de brider le réalisateur dans son élan et les producteurs prennent le lead sur le projet. Selon les dernières fuites et les bouts d’interviews qui arrivent jusqu’à nous aujourd’hui, le studio aurait coupé allègrement dans le film, modifiant sans ambages le script puis le montage final sans l’aval d’Abrams – “On a vu ce que ça fait quand on laisse les clefs de la boutique aux créas”, aurait-on entendu du côté des réunions d’actionnaires de chez Disney.
Le film ne prend alors plus aucun soin à respecter une quelconque cohérence. Si contrairement au VIII il tente de rester dans les règles de l’univers, il cache quand même bien maladroitement la merde sous le tapis, usant du montage épileptique et d’enjeux sans queue ni tête pour faire écran. Pour chaque point soulevé par Les Derniers Jedi, L’Ascension de Skywalker opère une ablation. Plus de Snoke, vous aurez l’Empereur. La ‘méthode Holdo’ ? Trop hasardeuse. Personne n’est venu nous aider ? Tout le monde viendra cette fois. On n’était plus que 8 ? On est une vraie force armée maintenant. Les Chevaliers de Ren ? Ok, on les ressort. Rey ne s’est jamais entraînée ? Maintenant si. Elle est la fille de personne ? En fait si…
À son tour, Abrams fait son pied de nez à Johnson. Un pied de nez qui ira même jusqu’au majeur bien levé, comme un sabre laser bien tendu et récupéré par le fantôme de Luke : “Il faut traiter cet objet avec plus de respect”. Une défiance qui fera même dire au personnage : “J’avais tort sur toute la ligne”. Sur son siège, le fan se sent (un peu) vengé. Mark Hamill jubile, Abrams pouffe derrière sa caméra, mais le film n’en ressort pas grandi.
The Great Pretender
Star Wars IX a atterri dans notre galaxie, emportant avec lui toutes les casquettes et les casseroles de ses prédécesseurs, et surtout les aberrations de production que cette Postlogie a traversé. Quels éléments sont liés aux choix d’Abrams ou aux idées originales de Lucas ? Que reste-t-il du script initial de Trevorrow ? À quel niveau les volontés politiques de Kennedy et les changements opérés par les gros bonnets qui portent le chéquier ont joué dans la balance ? Y a‑t-il un message véhiculé dans cette trilogie qui ne soit pas là que pour répondre à l’agenda de la firme ? J’espère un jour voir un doc sur le sujet tant l’histoire derrière la caméra semble plus riche en rebondissements que ce pastiche de Star Wars.
Accrochez-vous à votre fauteuil, le départ est imminent. Star Wars IX n’est pas un film. C’est une attraction. C’est parti pour un tour de manège ! Attrapez la queue de Mickey ! On ne se cache même plus. Le générique déroulant vomit d’entrée ses inepties. PALPATINE EST DE RETOUR. Pas l’ombre d’un doute. Pas de ‘mystérieux message’ sur lequel nos héros iraient enquêter… Non. Plus le temps. L’Empereur Palpatine, méchant retord et ombre maligne des trilogies précédentes est de retour. Pour ceux qui voudraient se fader la révélation, vous pouvez vous rendre sur Youtube et taper les mots ‘Star Wars Fortnite Event’. Vous ne rêvez pas. Le fameux message dont parle le générique d’intro de l’Épisode IX fait référence à un événement Fortnite. On en est là. Oui, déjà là alors qu’aucune image filmée n’a encore été projetée.
Palpy fait de la résistance
S’en suit la classique pano vers le bas ou le haut propre à Star Wars où on découvre une planète et le début du film. Mais pas le temps on vous a dit : à peine avons nous pu découvrir une planète de lave que le montage nous entraîne dans un ralenti-accéléré à la 300 de Kylo Ren en train de latter des gens. Qui ? Où ? Quand ? Pour le savoir, direction le Guide Officiel. Voilà. C’était la planète Mustafar. Là où Vador et Obi-Wan s’affrontent à la fin de l’Épisode III. Mais si, vous savez, la planète de lave… Là il trouve un Holocron Sith Wayfinder Sith qui lui indique où serait caché l’Empereur. L’un des deux seuls. Pourquoi deux ? Parce que les Siths vont toujours par deux. Un Maître détenteur du pouvoir et un Apprenti qui veut lui prendre. La fameuse règle des deux. Ah oui, mais c’est pas dit dans le film. Pas le temps.
Sans transition Kylo débarque sur une nouvelle planète, Exogol. Le berceau des Siths. Ok, donc on crée une nouvelle mythologie sans pression. Exit Korriban et des milliers d’années d’histoire, pourtant importée et canon. Là, en deux phrases, trois champ-contrechamps et des effets dignes de la Hammer, on apprend que Snoke était une création de synthèse, clone raté d’on ne sait pas trop quoi, et que oui, c’est Palpy qui tire les ficelles dans l’ombre. Et du haut de son animus disproportionné, il est ok pour filer les plein pouvoirs à Kylo. C’est le Dernier Ordre. L’Empire et sa flotte cachée de centaines de Destroyers qui sortent comme par magie du sol avec des équipages déjà constitués. Des Destroyers tous armés d’un canon destructeur de planètes, un peu comme les super bases d’avant. Genre on refera pas le mêmes erreurs. Voilà donc la menace : des vaisseaux old school avec des zizis de la mort. Joie. Palpy est ok pour tout filer à Kylo s’il parvient à tuer Rey, dernier Jedi en date. Oui car on le sait, les Siths n’aiment pas trop trop les Jedi…
Fade to Rey
Du côté des héros, on oublie tout. Rey s’entraîne alors que jusqu’ici elle a tout réussi sans en avoir besoin, et son nouveau maître, c’est Leia. Bah oui les cocos, y reste plus qu’elle vu que Johnson a buté le dernier prof de la galaxie. Rose sera coupée au montage, Dominic Monaghan (Merry dans Le Seigneur des Anneaux) n’est jamais nommé ou présenté, et on essaie de coller des rustines en rajoutant le fils de l’Amiral Ackbar, mort comme une tanche juste avant le moonwalk Marie Poppins tiers de Leia dans Les Derniers Jedi. Poe, Finn et la clique réussissent à choper une info grâce à un espion au sein du Premier Ordre et passent de planète en planète en enclenchant la vitesse lumière à toute berzingue pour semer les chasseurs TIE du Premier Dernier Ordre, annihilant au passage toute la pseudo intrigue du VIII autour du ‘traceur d’hyperespace’. Parce que oui, maintenant, tous les vaisseaux en sont équipés apparemment, même les monoplaces.
Je vous fais gré des péripéties ineptes qui suivent. Le scénario du film est monté comme un mauvais jeu vidéo des années 2000. Il vous faut trouver un objet qui vous permet de découvrir une info qui vous mène à un endroit qui… C’est nul. Riri, Fifi et Loulou s’embarquent alors dans une fuite en avant pour choper le second Wayfinder Sith. Et qu’apprend-on grâce aux livres Jedi que Rey avait sauvé du Fahrenheit que voulait le faux Luke du VIII ? Que Ronchon Skywalker avait lui aussi cherché la boussole de l’espace. Embarquement immédiat pour le Burning Man local avec une énième planète de désert, et des aliens en toge qui se la collent pépouze dans un décor vide.
Why so serious ?
Arrive alors Lando. Un Lando en forme qui a pris des formes. Et des dialogues de qualité. “I’ve got a bad feeling about this” : Ok, c’est coché. Next ? Bah plus rien. Rien de prévu pour Lando. Tout son texte après ça se résume à “Ha Ha Ha Ha Ha”. Vous ne rêvez pas. Lando ne fait que rire à chaque rare plan où le verra maintenant. Mais comme on n’a pas le temps, on enchaîne, en route pour retrouver un mystérieux assassin Sith qui posséderait le Wayfinder.
Dans la série des nouveaux pouvoirs, Rey et Kylo sont plus que jamais ‘unis dans la Force’ par un lien mystérieux : une Dyade. Et vous savez quoi ? Tout le monde semble savoir de quoi il s’agit. Même ceux qui pensaient que la Force, les Jedi etc. n’étaient que légendes il y a deux films… Pour la faire simple, ils partagent un lien particulier qui fait qu’ils peuvent communiquer et se voir quand ils le souhaitent d’un bout à l’autre de l’univers. Mieux encore, ils peuvent même interagir l’un avec l’autre, se battre ou se passer des objets. Le lien qu’ils partagent n’était donc pas créé par Snoke comme le disait le VIII. Prends encore ça dans ta face, Johnson !
Les Chevaliers de Rien
Après une course poursuite sans saveur où on découvre que maintenant certains stormtroopers sont équipés de jetpacks, le groupe échoue dans une grotte où Rey utilise un nouveau pouvoir cheaté de Jedi : le soin. Mais comme on a vu un personnage iconique de The Mandalorian s’en servir dans la série, ça passe ? Mouais. Si ça marche sur un animal soit, mais si ça marche sur un humain, attention à la cohérence… Dans la grotte, Finn, Poe Rey, 3‑PO et Chewbacca découvrent une Mercedes Sith, avec une insigne sur le capot. Comme si suivre les prérogatives Sith c’était un signe extérieur de cool attitude sous la Nouvelle République. Je… Je… Je ne sais plus quoi dire.
Après une énième pose dans le désert, genre plan aérien à l’hélico qui claque, les Chevaliers de Ren, tant teasés depuis l'Épisode VII vont suivre la voie du Capitaine Phasma dans la série des bonnes idées pas creusées. Car à part avoir un vaisseau qui fume et se faire latter comme des blaires à la fin, on ne saura rien d’eux. Qu’ils fussent les anciens élèves de l’Académie Jedi de Luke ou des randoms, le résultat sera le même.
Je n’aurai pas le temps
Mais faisons un saut dans le temps. Plutôt que de suivre le fil des péripéties, allons droit au but, car la suite n’est pas plus glorieuse. Finn aura à cœur de ne surtout pas dire à Rey qu’il est sensible à la Force. Plus le temps. On découvre enfin un peu d’infos sur le passé de Poe. Mais pas trop. Plus le temps. On découvre enfin un général du Premier Ordre pas débile et charismatique. Mais c’est trop tard. Plus le temps. En fait c’était Hux l’espion. Pourquoi ? Parce que ! Les héros tombent sur la fille de Lando, une ancienne Stormtrooper qui a déserté, mais on va pas creuser, ni même le dire clairement. Pas le temps.
Passée la course de la première moitié, le film se rend compte qu’il va falloir conclure. Et quoi de mieux pour ça que des revirements soudains qui feraient passer la Daenerys de la dernière saison de Game of Thrones pour quelqu’un de constant dans ? Dans un combat sans hauteur et sans musique, Rey et Kylo se déchirent. Contre toute attente, Rey est dominée. C’est-à-dire que sans entraînement, rien ne l’arrêtait, mais là, elle n’y arrive plus. Leia – Maître Jedi qui s’est entraînée avec Luke mais a dissimulé au monde sa formation et ses pouvoirs – balance alors à son Kylo Ren de fils une projection de Han Solo, son père, dernière tentative pour que le petit Ren finisse sa crise d’ado et reprenne les bancs de l’école.
Rey en profite et blesse mortellement le vilain garnement. Puis le soigne. Parce que les Jedi oui, ça fait ça maintenant. J’avais pourtant fait ma mise en garde il y a quelques lignes… Donc Qui Gon Jin dans l’Épisode I, on pouvait pas le soigner ? Et éviter toute la tragédie ? Qui ? Hein ? Ta gueule c’est magique. Bon Ok. De toute façon on n’a plus le temps. Alors vous allez me dire que ça ne s’est pas tout-à-fait passé comme ça. C’est vrai. Le montage final foire un peu l’ensemble, mais c’était écrit comme ça et voulu par Abrams. Leia meurt là-dessus. Fallait bien une porte de sortie pour Carrie Fisher, décédée peu de temps après la sortie de l’Épisode VIII.
Mon esprit est ailleurs
Après deux trois scènes d’amorce : on sait où est le méchant ; j’ai plus foi en rien mais le fantôme de Luke va m’aider ; finalement, je vais corriger mes erreurs ; ah oui merde il faut finir… Rey se retrouve devant Palpy, qui s’avère être son grand-père. Et là je vous avoue que je me paume un peu. Le plan de l’Empereur c’était de filer le bousin à Kylo s’il tuait Rey. Mais là, il est content de la voir débarquer parce qu’en fait c’est à elle qu’il souhaite filer son héritage. Sauf qu’en fait c’est une ruse parce ce qu’il veut c’est prendre possession de son corps, un nouvel ‘hôte’ en somme, et pour ça il faut qu’elle le tue. Mais elle veut pas. Mais elle l’affronte… Et le tue. Donc c’est ce qu’il voulait. Mais en fait c’est pas grave. Comment ? Ça ne tient pas la route ? Mais là où on va, on n’a pas besoin de route…
Blague à part, même sans ce tricot hasardeux, ce final reste bâclé. Rey renvoie les éclairs de son papy Palpy et lui fait péter la rondelle. Comme dans l’Épisode III face à Windu, il pouvait pas juste arrêter d’envoyer des éclairs ? C’est ça le combat final ? Ah oui parce que l’Empereur, quand il voit qu’elle veut pas reprendre la boulangerie familiale, il est un peu chafouin. Surtout que Ben Solo se rebelle contre lui aussi. Et là, il se rend compte qu’ils partagent leur lien bidon, et se sert de ça pour aspirer leur essence de vie, et retrouver les 80 ans de sa jeunesse. Donc plus besoin de personne, emphase et glas qui sonne.
This is the end
L’Empereur est cette fois bien de retour, prêt à nous jouer un mauvais tour. Il déchaîne alors des torrents d’éclairs dans l’atmosphère. Ses pouvoirs semblent sans limite et il vient mettre à mal l’armée de rebelles et tous les soutiens qu’ils ont reçu, les peuples libres se la jouant comme les Anglais pour sauver l’armée à Dunkerque, avec une flotte disparate de coques de noix et de chalutiers de l’espace.
Et ce sera tout. Oubliez la fatalité et le combat entre Obi-Wan et Anakin sur la musique de Battle of the Heroes dans La Revanche des Siths. Oubliez le poids de l’héritage de Luke contre Vador, à la fin de toutes choses dans le Retour du Jedi. Cachez vos ardeurs. Même si les acteurs sont venus en costume et qu’ils ont été filmés, il n’y aura pas de Kameha Père-Fils. Luke, Leia, Yoda, Obi-Wan, Windu, Kanaan, Ashoka, Anakin ou les autres ne seront pas du montage final, en fantômes de force derrière Rey. Tout se finira comme ça. Rey y laisse sa peau. Ben la soigne. Baiser inutile. Il meurt, elle vit. Elle renie sa famille, car seules ses actions la représentent et sera une Skywalker d’adoption, avec une sabre jaune-doré de Jedi Gris. De Jedi quoi ? Pas le temps on vous a dit.
Tout ça pour ça. En dépit de tout ce gloubiboulga difforme et de son aspect rushé, ce Star Wars IX se laisse voir. Il a au moins le mérite de ne pas chier sur la saga, même s’il ne lui rend en rien hommage. Certains détails fonctionnent même presque, comme ce décor d'Étoile de la Mort en ruines et culbuté par les vagues. Comme Kylo Ren au début du film qui est enfin presque crédible en méchant. Comme Rey, qui dans ses moments de doute retrouve le côté pétillant de son personnage et laisse le spectateur sur le derche lorsque des éclairs jaillissent de ses mains. De vraies bonnes choses pointent leurs museaux, comme la dynamique entre les héros, enfin ensembles et enfin moteurs ; comme cet au-revoir de 3‑PO touchant (même s'il est nié 20 minutes plus tard) ou les larmes de Chewie à la mort de Leia. Une réaction qu'il n'a pas eue à celle d'Han Solo dans le VII, ici corrigée, et qui vaut plus qu'une médaille.
Fais comme l'oiseau, l'avion ou les supermen…
Cette trilogie se termine comme elle a commencé : elle est vide de sens. En ressortant Palpatine du placard, elle anéantit même l’action des héros de la trilogie initiale et crée des incohérences irrattrapables dans un univers complexe en détournant ses lois. Quand Lucas imaginait l’Empire et les Rebelles, il teintait son oeuvre de rêve et de magie, mais ne se cachait pas d’insérer, même de manière légère, des idéaux et des enjeux politiques. À travers six films inégaux, il a su créer une mythologie riche qui, en creux, raconte un conte où l’intime et la fresque se mêlent, avec en fil conducteur l’histoire d’une famille prise au cœur d’une guerre totale.
Avec sa Postlogie inutile qui claque la rétine grâce aux effets numériques, Disney accouche d’un paquet cadeau rutilant mais vide. Et je ne sais pas quel enfant rêve de paquets vides à Noël. Quand on compare la gestion de projet entre Lucasfilm et Marvel, on peut rester dubitatif. Star Wars ne mériterait-il pas d’avoir son Kevin Feige, grand ordonnateur des super-héros maison ? Car s’ils ne brillent pas d’une portée créatrice absolue, et malgré un formatage certain, les films Marvel parviennent malgré tout à garder leur cohérence, et chaque brique vient consolider l’édifice, chacun rivalisant d’envie ou d’intention pour permettre à l’ensemble de faire rêver les fans et les têtes blondes.
Un Nouvel Espoir ?
Peut-on relever la barre avec la machine Star Wars ? Si on en croit les critiques et la communauté, c'est la débandade, mais seuls les Siths sont aussi absolus. Au détour d'une planète, au fond d'un esprit, qui pourrait jurer que les choses ne sont pas en train de changer. Il faut des défaites pour avancer. Et mine de rien, on dirait presque que le vent a commencé à tourner. Trop tard pour redresser la barre sur cette trilogie, mais pas pour tout arrêter. Des noms comme John Favreau ou Taika Waititi semblent être de plus en plus fréquemment cités lorsqu’on évoque l’après. Si on se réfère aux bruits de couloirs Kathleen Kennedy serait sur la sellette, pour l’ensemble de son œuvre. Mais plutôt que de pointer du doigt un coupable, ne vaudrait-il pas mieux regarder vers l’avenir ?
Tandis que The Mandalorian semble remettre tout le monde d’accord, que les comics Star Wars se distinguent par leur qualité et leur envie de combler les vides, peut-on encore espérer un avenir meilleur ? Verra-t-on une annulation ou un remake de cette trilogie ? Ou la firme réussira-t-elle à aller de l’avant en laissant cet écueil derrière elle ? Je rêve pour ma part qu’un ou une architecte ayant des choses à raconter s’emploie aujourd’hui à élaborer un nouveau projet, et qu’il invite des gens visionnaires, tant à l’écriture qu’à la réalisation, à venir enrichir le tout. Star Wars n’a pas besoin de s’affranchir des Skywalker pour avancer, mais d'inventer des histoires innovantes qui viendront faire évoluer sa mythologie en ouvrant de nouvelles pages. Qu’ils le fassent, ou ne le fassent pas. Mais plus d’essais.
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Crédits et Images : Lucasfilm, Disney
2 commentaires
Encore une fois ça parle que de scénario et c'est pas pertinent, on s'habitue quand on regarde Menraw chaque semaine dans Allociné l'émission…
Débattre serait plus pertinent que de faire du passif agressif mon bon ! Tu as bien le droit de ne pas être d'accord, mais ce serait beaucoup plus intéressant de l'expliquer en respectant les avis de tous tu trouves pas ?
On a la place ici, autant en profiter 🙂