Voilà maintenant quelques jours qu’Amazon a révélé que sa future série télé ancrée dans l’univers de la Terre du Milieu de Tolkien se déroulerait au Second Age. Au second quoi ? Un tweet laconique pour certaines et certains, mais une info croustillante et complètement folle pour les fans du Seigneur des Anneaux. Explications.
J’ai déjà eu l’occasion et le plaisir d’expliquer en quoi cette histoire de Second Age était complètement wahou, mais le format vidéo du Récap Séries, et ses timings imposés m’ont contraint à faire des raccourcis et de belles approximations. Devant les retours positifs que j’ai reçus depuis, je me suis dit que la liberté de taille et de ton qu’offre Le Grand Pop pouvait me permettre de poser les choses convenablement. Comme vous le savez sûrement si vous avez jeté un œil à l'article sur Le Bâtard de Kosigan, je suis plutôt amateur de fantasy et cet enclin initial, il faut l'avouer, a été décuplé en son temps lorsque je découvrais adolescent l'univers de Tolkien. C'est dire si je prends cet univers à cœur. Prenez donc une chaise et rapprochez-vous de la cheminée. Venez vous réchauffer près du foyer, et laissez-moi vous parler un peu de ce qu’on peut attendre de cette future série télé du Seigneur des Anneaux sur Amazon Prime Video.
What’s my age again ?
Pour bien comprendre tous les tenants et aboutissants de cette annonce, il va nous falloir faire un peu d’histoire… Attendez, ne partez pas tout de suite ! Elle est garantie bien classe et comprend son lot de dragons, elfes et divinités. Et si je vous disais que Sauron n’est pas le grand méchant, mais le second du vrai world boss ? Et si je vous disais que Smaug est un ‘petit’ dragon, qui fait le dixième d’Ancalagon le Noir ? Et si je vous disais qu’il fut un temps en Terre du Milieu, où des armées de balrogs rugissants et des centaines de dragons livraient des batailles à des dieux et des elfes aux pouvoirs rayonnants ?
J’espère vous avoir accroché. On est partis, on va se faire en quelques paragraphes, un petit Le Seigneur des Anneaux pour les Nuls. De quoi briller en société lors de votre prochain repas dominical, entre le rôti et les flageolets. Pour toutes celles et ceux qui ne connaîtraient du Seigneur que les films, un préambule s’impose toutefois : tout ce que vous connaissez – Aragorn, Gandalf, Frodo, Sam… – se déroule à la toute fin de l’histoire de la Terre du Milieu, et à la toute fin de tout ce que Tolkien, l’auteur, a écrit. Le monde décrit dans Le Seigneur des Anneaux est un monde où le magique, le féérique, se raréfie. Les pouvoirs dantesques des premiers temps s’estompent, et les forces que l’on croise ne sont que de pâles échos de celles qui peuplaient la planète dans les temps anciens. L’action des livres et des films se déroule à la toute fin de ce que l’on appelle le Troisième Age. Et qui dit troisième, dit à coup sûr au moins premier et deuxième. Repartons donc à l’aube des temps de l’univers de Tolkien.
Singin’ in the rien
Je vais vous la faire rapidement. À l’origine, le vide, l’espace. Un dieu appelé Eru Ilúvatar. Un dieu unique est omnipotent, proche des conceptions monothéiques. Puis des divinités un peu moins puissantes, mais quand même bien balèzes. Une petite douzaine de déesses et de dieux appelés les Valar. Pour vous figurer ça de manière grossière mais efficace, imaginez un panthéon polythéiste comme celui des Grecs ou des Romains. Autour d’eux, une ribambelle de ‘demi-dieux’ on va dire, les Maiar. Des Maiar en général affiliés à un Valar. Tout ce petit monde est regroupé sous le terme des Ainur, l’ensemble des divinités de la Terre du Milieu. Terre qui à ce moment-là n’existe toujours pas d’ailleurs… Personnellement, j’imagine des boules de lumière iridescentes de différentes couleurs, comme les Whisps de Warcraft 3.
Reprenant le chant du dieu suprême, les Ainur entonnent alors un chant qui donne naissance à l’univers : l’Ainulindalë ou La Musique des Ainur. C’est le nom du premier chapitre du Silmarillon de Tolkien. Après l’univers, les dieux créent la planète où tout va se dérouler : Arda. Et au milieu d’Arda, les dieux et les déesses vont créer avec leurs petites mimines plusieurs continents, dont un pile entre les deux autres : La Terre du Milieu. Bam ! La révélation !
Assonance
Bien évidemment, tout ne va pas se passer calmement. L’un des plus puissants des Valar, dès les premières harmonies de ses frères et sœurs tente des solos, des contrechants, différentes voix, etc. Résultat, les créations imaginées par la majorité bienveillante partent en cacahuète. Même quand Arda est créée et que les dieux décident de s’y incarner pour façonner la planète, ce Valar particulier, appelé Melkor, prend un plaisir non dissimulé à péter les montagnes à peine sorties de terre ou à faire évaporer les océans avec des volcans et des tremblements de terre. Ce petit plaisantin, vous l’aurez compris, va devenir le big boss des bad guys, le Lucifer local. Mais nous n’entrerons pas cette fois ici dans les détails.
Ce qu’il faut retenir, c’est qu’à partir du moment où les dieux choisissent de s’incarner sur Arda, on commence à compter les années du monde, et qu’avant d’arriver au Seigneur des Anneaux, il va se passer à peu près 12 000 ans, divisés en différentes périodes. Un peu comme nous avec le Crétacé, le Jurassique, le Mésozoïque et toute la clique…
Time after time
En général, on se dit que du moment où les Ainur s’incarnent sur Arda jusqu’à la naissance des Arbres, c’est l’Âge des Valar. Il dure 3 500 ans. De la naissance des Arbres au premier lever de la lune et du soleil, soit 1 500 ans, on est dans l’Âge des Arbres. Puis de l’éveil des Hommes au moment où les dieux entrent en guerre contre Melkor pour le jeter hors du monde, c’est le Premier Âge (quasiment 600 ans). De la fondation des Havres Gris à la bataille de la Dernière Alliance, c’est les presque 3 500 ans du Deuxième Âge.
Et enfin, du moment où Sauron perd l’Anneau, jusqu’au départ des porteurs des Anneaux, c’est le Troisième Âge, qui s’étale lui sur un peu plus de 3 000 ans supplémentaires. Passé cette date, on connaît 120 ans grossièrement, mais Tolkien n’a jamais jugé intéressant ce qui se passait après la défaite contre le ‘Mal’. Tout ce qui suit n’étant “qu’affaires humaines sans grande envergure”. Il situe quand même dans sa correspondance que notre monde moderne s’inscrirait quelques 6 000 ans plus tard, vers la fin du Sixième Âge…
Auprès de mon Arbre
On l’a vu, l’Âge des Valar s’étale de l’arrivée des Divinités jusqu’à la Naissance des Arbres. Alors on ne parle pas ici des arbres en général, ceux qui jalonnent déjà Arda depuis des lustres, mais de deux arbres en particulier : Telperion et Laurelin. Pour comprendre l’histoire des Arbres, il faut une fois de plus remonter le temps. Les Divinités, à peine incarnées sur Arda, se mettent à l‘ouvrage pour façonner le monde. Très rapidement, ils arrivent à une conclusion de maboule : il leur faudrait de la lumière pour pouvoir contempler leurs créations. Ils décident alors de fabriquer deux immenses lampes, érigées chacune au sommet d’une tour…
Mais comme on l’a vu, Melkor détruit tout ce que les autres dieux et déesses tentent de mettre sur pieds, et bien évidemment, les deux lampes vont finir par être détruites à leur tour. Les divinités tentent alors une nouvelle stratégie : elles quittent la Terre du Milieu et s’exilent sur Aman, le continent à l’ouest, se barricadent derrière une énorme chaîne de montagnes infranchissables, et plantent deux Arbres. Deux arbres géants, l’un doré et l’autre argenté. Deux arbres magiques on va dire, qui éclairent le monde depuis la Terre des Dieux qu’ils baptisent Valinor. Pour celles et ceux qui veulent des analogies, c’est un peu le Valhalla d’Odin. Ainsi s’achève l’Âge des Valar.
Le Soleil a rendez-vous avec la Lune
Et tel le flux et le reflux des marées, les choses se répètent. Les elfes s’éveillent en Terre du Milieu et les dieux leur proposent de les rejoindre sur Valinor, à l’abri de Melkor. La plupart acceptent. Une guerre explose entre Melkor et les autres dieux, et Melkor est emprisonné. Les elfes qui ont rejoint Valinor fondent leurs premiers royaumes. Les millénaires passent. Melkor a purgé sa peine. Passant pour un repenti, il est libre d’aller et de venir à sa guise. Il parvient à convaincre l’un des elfes les plus doués, Fëanor, de sauvegarder la lumière originelle des Arbres dans des joyaux, les Silmarils… Au cas où il arriverait quelque chose aux arbres…
Puis, aidé par l’araignée géante dévoreuse de lumière Ungoliant, Melkor détruit les arbres et dérobe au passage les Silmarils. Rendus fous de rage, l’une des plus grandes familles elfes, les Noldor, se lance à la poursuite du dieu. Dans leur fuite en avant, il feront pour la première fois couler le sang d’autres elfes, entraînant le châtiment des dieux : ils sont bannis de Valinor et doivent s’exiler en Terre du Milieu. Les dieux créent alors la Lune et le Soleil, et le cycle du jour et de la nuit. Les humains s’éveillent en Terre du Milieu, c’est le début du Premier Âge.
The first, the last, my everyone
Et ce Premier Âge, s’il ne dure que quelques centaines d’années, est sans doute le plus grandiose. Celui où voient le jour les plus grands héros elfes, humains ou nains de tout l’univers de Tolkien. Un elfe gris marié à une demi-déesse, le premier mariage entre elfe et humain, la création de cités elfes incroyables, à faire passer Minas Tirith pour un bourg de campagne, des armées colossales, des armes magiques et des pouvoirs incalculables… Les orques, les trolls, les goblins… Des batailles dantesques où des armées de balrogs et de dragons déferlent sur les armées elfes et humaines… Un Âge guerrier, mythique, synonyme de tragédies… Melkor est un dieu maléfique qui n’aura de cesse d’anéantir humains et elfes. Rebaptisé Morgoth par ces derniers – Lucifer devenant Satan – l’ennemi prend corps en une entité géante bardée de fer. Il est armé d’une masse d’arme colossale et arbore au front une couronne sertie des Silmarils.
Il est accompagné de nombreux Maiar, de demi-dieux donc, qui décident à leur tour de s’incarner en imitant leur maître. Ils choisissent pour la plupart de devenir des géants de feu et d’ombre, et s’arment d’épée ou de fouets de feu. Le plus puissant d’entre eux, un sorcier capable de changer de forme à volonté devient son bras droit et le général de ses armées. Il s’appelle Sauron. Instant révélation. Dans Le Seigneur des Anneaux, Gandalf triomphe du dernier balrog dans la Moria. Un demi-dieu de même nature que Sauron. Gandalf est un boss.
Grandeur et décadence
Impossible de raconter le Premier Âge en quelques lignes. Trop dense. Trop d’histoires. Trop de superlatifs. Trop de tristesse aussi. Les elfes et les humains ne feront que reporter l’inéluctable. La guerre qu’ils mènent ne peut être remportée. Petit à petit, les royaumes tombent. L’étau se resserre. Les peuples libres de la Terre du Milieu sont au bord de l'extinction. L’une des dernières cités elfes est mise à sac. Cette légende restera dans les annales, c’est La Chute de Gondolin, une des histoires du Silmarillion parmi les plus développées.
En effet, contrairement au Seigneur des Anneaux qui suit un récit chronologique au plus près de ses personnages, le Silmarillion est une œuvre parcellaire qui retrace les âges du monde dans ses grandes lignes, prenant juste parfois un peu plus son temps sur certains chapitres. Comme un recueil de nouvelles qui se voudraient anthologiques – les héros changent à chaque histoire – le Silmarillion est pluriel est découpé en plusieurs chants. La Chute de Gondolin, au même titre que Beren et Lúthien, ou les Enfants de Húrin sont trois histoires majeures se déroulant au Premier Âge et qui plantent les graines du futur Seigneur des Anneaux, en racontant les aventures des ancêtres des personnages que nous connaissons.
Here comes my hero
Parmi les filiations importantes, une sort du lot, celle d’Eärendil, fils d’Idril Celebrindal, princesse elfe de Gondolin, et de Tuor, un humain descendant de Húrin. Ce demi-elfe, plutôt que de prendre les armes contre Morgoth, décide d’armer un navire, de sertir à sa proue le Silmaril dont il hérite, et de braver la malédiction des dieux, en tentant de trouver Valinor et de les appeler à l’aide. Il finira par y parvenir et à convaincre les dieux.
Ces derniers rentreront en campagne contre Morgoth, l’armée des Dieux composée des elfes de Valinor, des Maiar restés fidèles, des elfes Noldor encore en vie et des clans humains anéantira les armées de Morgoth dans un cataclysme inégalé : le Beleriand, pays des elfes en Terre du Milieu sera noyé sous les eaux et ravagé. Seule la partie est sera sauvée, transformant irrémédiablement le monde. Devant les ravages causés, les dieux s’interdiront dès lors toute action directe, préférant user de leur influence pour faire se lever et bénir les forces qui leur sont fidèles. Morgoth est jeté hors du monde. Les Silmarils sont perdus à jamais. Ainsi débute le Deuxième Âge. Celui où se déroulera la future série télé d’Amazon. On y arrive.
L'Âge de raison
Entre un Premier Âge infaisable à l’écran de part sa grandiloquence et sa forme décousue et inégale et un Troisième Âge très développé avec Le Seigneur des Anneaux et Le Hobbit, nous reste un Deuxième Âge riche en événements et surtout assez peu développé. La future série d’Amazon tient là à coup sûr un terreau fertile, les scénaristes pouvant s’étendre avec envie sur 3 000 ans d’histoire au final assez peu détaillée. Reprenons donc le fil de notre récit. Sur les restes de la Terre du Milieu, le Second Âge débute avec la fondation des Havre Gris par le haut-elfe Círdan. Mais si, vous connaissez les Havres Gris. C’est le port où Frodo, Gandalf et compagnie quittent le Terre du Milieu à la fin de la trilogie cinématographique de Peter Jackson.
Pour les humains, les Edains, les choses sont un peu différentes. Vous vous rappelez d’Eärendil ? Et bien, si lui de son côté est remercié en devenant l’Étoile Polaire qui guide les elfes et les hommes, ses descendants restent en Terre du Milieu. Issus à la fois d’une elfe et d’un humain, Eärendil est un demi-elfe, et les dieux, toujours en remerciement, accordent à tous ses descendants de pouvoir choisir leur destin. Soit ils deviennent humains, vivent intensément, et à leur mort partent rejoindre le dieu suprême, soit ils deviennent elfes, sont immortels mais liés à la Terre du Milieu, et s’ils viennent à mourir un jour, ils rejoignent Valinor.
Love me two times
Eärendil a deux fils. L’un choisit de devenir elfe. Il s’appelle Elrond. Oui le Elrond du Seigneur des Anneaux. L’autre préfère partager le sort des humains. Il s’appelle Elros. S’il devient mortel, il reste doué d’une consistance supérieure, elfique, bénie, ce qui lui accorde, outre une résistance aux maladies, une durée de vie conséquente de plus de 600 ans en moyenne. Pour les remercier de leur bravoure dans la guerre contre Morgoth, les humains reçoivent en plus un don du dieu suprême : un nouveau territoire, une île surgie de nulle part au beau milieu de l’océan entre Valinor et la Terre du Milieu. Cette île est appelée Númenor. Elros devient le premier roi de Númenor et crée la civilisation des Númenoréens.
Presque 600 plus tard, les Númenóréens reviennent en Terre du Milieu et dispensent leur savoir pour aider les autres peuples. Les elfes survivants fondent l’Eregion, leur nouveau royaume. Gil-Galad devient haut-roi des Noldor, et se rapproche des nains qui ont colonisé les sous-sols de la Terre du Milieu. S’ils n’ont que peu pris part au conflit jusqu’ici, préférant se concentrer sur le développement de leur propre civilisation, les nains peuplent la Terre du Milieu depuis des temps immémoriaux. Ils sont même les premiers êtres vivants à s’éveiller bien avant les elfes ; mais créés par un Valar et non pas le dieu suprême, ils seront replongés dans leur sommeil jusqu’aux grandes guerres contre Morgoth.
Quand débute le Deuxième Âge, les nains sont au faîte de leur gloire, et vivent dans la cité de Khazad-Dûm (qui deviendra la Moria). Ils travaillent le mithril, et les elfes forgerons, héritiers des forgerons qui avaient jadis créé les Silmarils trouvent là une alliance des plus intéressantes.
The ring of fire
Sauron de son côté a survécu. Il réapparaît en Terre du Milieu, et s’installe au Mordor où il entreprend la création d’une nouvelle forteresse, Barad-Dûr, pour remplacer celle qu’il occupait avec son maître. Attention, le Sauron qui arpente la Terre du Milieu à cette époque n’a rien à voir avec le Sauron que vous connaissez. S’il fut général de Morgoth, il se pose comme un repenti qui veut corriger ses erreurs, possède un physique d’elfe séduisant et passe pour un demi-dieu instruit appelé Annatar.
S’il agit pour son propre chef, il le fait dans l’ombre, menant un double jeu. Il se rapproche notamment des elfes d’Eregion et des nains. Il influence les forgerons elfes grâce à son charme et ses talents, les encourageant à de nouvelles expérimentations. Parmi eux, Celebrimbor, rencontré dans le jeu vidéo L’Ombre du Mordor, se laissera abuser par Sauron mais finira par le percer à jour. De cette funeste collaboration naîtront les Anneaux de Pouvoir. Tous seront corrompus par Sauron, sauf trois que Celebrimbor a forgé seul. Ses trois là, il les donne aux seigneurs elfes de son temps : Círdan héritera de l’Anneau du feu, Galadriel de celui de l’eau et Gil-Galad de celui de l’air.
Démasqué, Sauron se réfugie au Mordor et forge en secret l’Anneau Unique qui lie entre eux tous les esprits de ses porteurs sous son joug. Il distribue les Anneaux de Pouvoir aux rois humains et nains qui ne voient encore en lui qu’un conseiller des dieux. La guerre éclate à nouveau en Terre du Milieu. Les elfes et les nains sont sauvés in extremis par l’intervention des Númenoréens. Dévastée, l’Eregion est abandonnée. Les Nazguls apparaissent et sèment la terreur. Elrond fonde alors la cité cachée de Rivendell dans la vallée d’Imladris. C’est là que se tiendra plus tard le fameux Conseil.
Atlantis is calling
Sauron est fait prisonnier et emmené à Númenor. En moins de 100 ans d’emprisonnement, il passe de prisonnier à conseiller du roi, usant de ses paroles subtiles et de son charme. Contre toute attente, il parvient à instiller la folie dans l’esprit du roi de Númenor Ar-Pharazôn qui se lance dans un projet fou : faire payer aux dieux leur traîtrise et la mortalité des Númenoréens. À la cour de Númenor, des voix s’élèvent contre ce projet blasphématoire, mais les dissidents, appelés les Justes, sont massacrés. Seul Elendil et ses deux fils, Isildur et Anarion parviennent à s’échapper. De royaume humaniste et raffiné, Númenor est devenue une nation fasciste. Ar-Pharazôn fait armer sa flotte et attaque Valinor.
Ilúvatar, le dieu suprême intervient une deuxième et dernière fois : en une journée il anéantit la flotte Númenoréenne, et ensevelit l’île sous les flots, c’est l’Akallabêth, la fin de Númenor. Valinor est retiré des cercles du monde, et la route pour s’y rendre cachée. Sauron perd son corps et son pouvoir de transformation. Son esprit regagne le Mordor et s’incarne dans une armure noire. Pour celles et ceux qui aiment bien les comparaisons, c’est la version de l’Atlantide par Tolkien.
Épilogue
Elendil et ses fils fondent les royaumes d'Arnor et de Gondor en Terre du Milieu. Elfes, nains et humains subissent les assauts répétés de Sauron et de ses troupes. La guerre fait rage. La cité de Minas Ithil au Gondor est prise d’assaut. Sauron la confie aux Nazguls et la ville devient Minas Morgul. Les elfes et les hommes s’unissent. C’est la grande bataille de la Dernière Alliance. Sauron est vaincu par Elendil et Gil-Galad, et Isildur s'empare de l'Anneau Unique : c’est la fin du Deuxième Âge, et le prologue du Seigneur des Anneaux version Peter Jackson.
Avant que la Guerre de l’Anneau ne fasse rage, il s’écoulera plus de 3 000 ans au Troisième Âge. 3 000 ans qui voient la chute de l’Arnor et ses survivants devenir les Dúnedains, avec en bout de liste Aragorn. 3 000 ans qui voient l’arrivée des Mages, la chute de Khazad-Dûm, la création du Rohan, le sac de la Montagne Solitaire par Smaug, et autres aventures épiques. Mais ces 3 000 ans se déroulent au Troisième Âge, nous finirons donc avec les perspectives du Deuxième Âge, période que les auteurs de la série ont choisie.
Qu’attendre de la série ?
Sur la carte révélée par Amazon, on voit d’ores et déjà l’Île de Númenor. Le Gondor et l’Arnor ne sont pas encore indiqués. Il y a fort à parier dès lors, que la série va raconter la création des Anneaux de Pouvoir, la trahison de Sauron, le sac de l’Eregion, l’arrivée des Númenoréens, l’emprisonnement de Sauron, la corruption d’Ar-Pharazôn, la destruction de Númenor, et la création des Royaumes Exilés. Un menu complet qui colle avec l’appellation Le Seigneur des Anneaux. Non plus au sens de l’adaptation, mais au sens littéral : on va vous raconter l’histoire des anneaux et de leur créateur.
Il est intéressant de noter que, jusqu’ici, seuls les droits de l’œuvre du Seigneur des Anneaux, puis du Hobbit, avaient été vendus par Tolkien et ses ayants-droits. Les droits relatifs au Silmarillion, aux Contes et Légendes Inachevés, aux Contes Perdus ou plus récemment aux nouvelles traductions de Beren et Lúthien, des Enfants de Húrin ou Lais du Beleriand ne font pas partie des accords. Christopher Tolkien, fils de l’auteur, a passé sa vie à ordonner les notes, comparer, réécrire, éditer les œuvres non publiées de son père, et s’oppose farouchement à de nouvelles adaptations. Aujourd’hui très âgé, il a laissé ou est en passe de laisser la main à son fils, beaucoup plus enclin à vendre les droits…
À quels accords Amazon et la Tolkien Society sont-ils parvenus ? Que pourra adapter le géant américain ? L’ouverture au Deuxième Âge porte à croire que de nouveaux accords ont été signés, les appendices du Seigneur des Anneaux restant trop légers pour se lancer dans un tel chantier. Vaste programme en somme, surtout quand on connaît le budget en milliards annoncé. Pour vous faire un ordre d’idée, disons qu’un épisode du Seigneur des Anneaux version Amazon représentera deux fois le prix d’un épisode de Game of Thrones… Deux fois.
Il reste toutefois de nombreuses énigmes entourant la future série. Si nous arrivons aujourd’hui à nous projeter dans les grandes lignes de l’histoire – et de vous à moi, je suis ravi de cette incursion au Deuxième Âge, bien plus que de la perspective de se taper l’enfance d’Aragorn – de nombreuses zones d’ombres persistent. La série sera-t-elle produite par Weta, la société de Peter Jackson, afin d’assurer une continuité dans les décors, le design ? Des acteurs iconiques comme Hugo Weaving ou Cate Blanchett reprendront-ils leur rôle ? Combien de saisons ?
En attendant d’en savoir plus, et de peut-être s’épancher à nouveau dans ces colonnes, ne boudez pas votre plaisir et n’ayez pas peur d’approfondir le sujet grâce aux livres de Tolkien. Pas forcément une lecture des plus simples, ni la mieux traduite, mais un univers, vous l’avez vu, d’une densité certaine, où tout fait sens, où le hasard n’a pas prise, des choix de noms aux logiques historiques. Après la trilogie du Seigneur – malgré la première moitié du livre 1, très indigeste – , je vous conseille comme porte d’entrée les Contes et Légendes Inachevées du Troisième Âge, histoire de rester en terrain connu, mais la suite passe inexorablement par le Silmarillion, véritable clef de voûte de l’ensemble.
Je m'en vais pour ma part vous laisser là-dessus, et essayer d'imaginer ce que sera cette série. Et si elle commençait par un prologue qui servirait à planter le cadre ? Un prologue qui montrerait le départ d'Eärendil, Valinor, la bataille de la Grande Colère et la défaite de Morgoth ? Un prologue comme celui qui clôt le Deuxième Âge, au début de la trilogie du Seigneur des Anneaux ?
Illustration de couverture : Edvige Faini
Images : John Howe, Alan Lee, Ted Nasmisth, Fanarts, New Line Cinema, Amazon Prime
Source : JRR Tolkien, Editions Christian Bourgeois, Pocket & LOTR on Amazon
6 commentaires
Bonjour, quelle sons les livre a lire appart Le seigneur des anneaux, le hobbit et le silmarillio, pour bien connaitre le lord du seigneur des anneaux ?
Hello ! Perso, en dehors de la trilogie du Seigneur des Anneaux, de Bilbo et du Silmarillon, j'aurais tendance à conseiller Les Contes et Légendes Inachevés (3 Tomes) pour approfondir ses connaissances sur l'univers de Tolkien. Pour aller encore plus loin, mais ça devient assez pointu, tu as aussi la collection des History of Middle-Earth, traduite en français avec La Route Perdue, les Lais du Beleriand, Beren & Luthien ou le tout récent La Chute de Gondolin. Mais ça risque de faire un peu redite. Autre alternative : Les Enfants de Hurin, qui est beaucoup plus proche du Seigneur dans sa structure, c'est aussi un roman. Bonne lecture !
Hello Menraw,
Je viens de redécouvrir ton article et il y a un détail qui me chiffonne. Tu parles de Christopher Tolkien comme s'il était encore vivant mais il me semble qu'il est mort en début d'année ?
En tout cas, un vrai plaisir à lire ton article !!
Geoffroy
Un viewer du Stream
Hello ! Effectivement. L'article remonte à mars 2019 et a donc été écrit avant son décès… Merci en tous cas pour ton retour ! À très vite 🙂
Toujours un plaisir de lire tes articles sur cet univers qui nous est on ne peut plus cher… (Petite précision cependant, il me semble qu’iluvatar intervient une troisième fois pour renvoyer gandalf après sa « mort » contre le fléau du durin, me trompes-Je ?)
Bravo pour cet article fort bien écrit ! Et j’en profite pour remercier le stream d’avoir parlé de mon boulot lors d’une de vos émissions mobile. Je suis un peu déçu de te savoir ne faisant pas parti de l’aventure doublage du 9 avril à Lyon, j’y aurai aimé te rencontrer !
Hello Bastien, c'est avec retard que je reviens vers toi, mais un magicien n'est jamais en retard paraît-il, puisqu'il arrive toujours à point nommé 🙂 Plus sérieusement, je pense que tu as tout-à-fait raison pour la 3e intervention d'Illuvatar, c'est bien vu !