Attendu par une horde de fans dĂ©terminĂ©s nâayant jamais jetĂ© lâĂ©ponge, la version Director's Cut du Justice League de Zack Snyder est un vĂ©ritable cas dâĂ©cole. Et le moins que lâon puisse dire câest que cette version divise. Quâon soit fan de comics ou que lâon veuille seulement juger de cette nouvelle proposition pour elle-mĂȘme ; quâon se soit passionnĂ© par les coulisses et la production ou quâon souhaite voir la fin prĂ©vue initialement, les levĂ©es de boucliers et prises de becs dĂ©passent le cadre mĂȘme du film. Moi qui balance entre deux Ăąges, je vous adresse Ă tous un message⊠Le temps ne fait rien Ă lâaffaire : quand câest plus long⊠câest plus long !
Wonât Get Fooled Again
Alors attention. Il ne sâagit pas ici de revenir en dĂ©tail et de maniĂšre exhaustive sur les diffĂ©rences entre les deux versions du film. Dâautres lâont dĂ©jĂ fait, de maniĂšre trĂšs dĂ©taillĂ©e et bien mieux que tout ce que votre serviteur pourrait Ăąnonner ici. Et je ne voudrais pas non plus tomber dans mes travers, ayant la fĂącheuse tendance Ă me complaire dans mes propres versions longues et articles trĂšs feuillus. Pour remettre une pointe de contexte, retenez simplement ces quelques faits.
La Warner, qui possĂšde le monopole des adaptations des productions DC Comics lance sa contre-offensive face au succĂšs sans prĂ©cĂ©dent du grand rival, Marvel. Pour contrer le Marvel Cinematic Universe, ou MCU, avec ses films, sĂ©ries et personnages qui se rĂ©pondent les uns les autres en un grand tout cohĂ©rent, les grands patrons de la Warner dĂ©cident de lancer leur propre univers Ă©tendu : le DCEU ou DC Extended Universe. Exit donc les films one shot, les trilogies classiques Ă la Dark Knight, les Batman de Tim Burton et Joel Schumacher, les Superman avec Christopher Reeves, etc. La rĂ©ponse sera dâutiliser les mĂȘmes armes que le concurrent qui fait trĂšs envie aux actionnaires maison avec ses milliards de revenus Ă chaque nouvelle sortie. Et si cĂŽtĂ© Disney on a un Kevin Feige comme grand ordonnateur, on va donner les plein pouvoirs Ă un homme seul ici aussi : Zack Snyder.
Cartoon Heroes
Nous sommes en 2013 et Zack Snyder signe le premier jalon de son univers Ă©tendu. Man of Steel, le nouveau film sur Superman est plutĂŽt accueilli tiĂšdement. On y dĂ©couvre un monde plus sombre que chez Marvel, avec un ton plus solennel et des hĂ©ros filmĂ©s comme des divinitĂ©s. Le nouveau Kryptonien est incarnĂ© par Henry Cavill et le rĂ©alisateur sâen donne Ă cĆur joie pour le reste du casting. Amy Adams, Russell Crowe, Kevin Costner, Michael Shannon, Diane Lane ou Laurence Fishburne sont au rendez-vous et offrent Ă ce Superman une certaine Ă©paisseur. En 2016, les prĂ©mices du DCEU sont posĂ©es, et un Batman v Superman : l'Aube de la Justice sensĂ© hausser dâun cran la dimension Ă©pique de lâunivers se vautre malencontreusement les pieds dans le tapis de la critique. TrĂšs attendu grĂące au bouche Ă oreilles et aux retardataires qui n'avaient pas laissĂ© leur chance Ă Superman, le film parvient tout de mĂȘme Ă plus que tripler la somme investie (on parle de 873 millions de dollars de recettes pour une mise de dĂ©part de 250 millions).
MalgrĂ© un casting une fois de plus 5 Ă©toiles oĂč se mĂȘlent Ben Affleck, Gal Gadot, Jeremy Irons, Holly Hunter ou Jesse Eisenberg, le film sâenlise dans une querelle aussi incongrue que sa rĂ©solution Ă base de mamans ne prĂȘte Ă sourire. Sâil ne manque pas de bonnes idĂ©es, comme de mettre ses hĂ©ros face aux consĂ©quences de leurs actes, et sâil plante comme prĂ©vu les bases de la future grande rĂ©union tant attendue, son scĂ©nario alambiquĂ© et son ambiance trĂšs premier degrĂ© peinent Ă convaincre. Les fans font le dos rond, le grand public nâest pas de la fĂȘte mĂȘme si le film fait de belles entrĂ©es et les pontes du studio font la grimace. En face, les Avengers battent tous les records.
Jesus Christ Superstar
Si cĂŽtĂ© Marvel on a choisi de faire un film ou deux par hĂ©ros avant de proposer une apothĂ©ose oĂč tout le casting se rĂ©unit comme un point dâorgue, chez DC on est parti sur quelque chose de diffĂ©rent. Qui a dit plus brouillon ? Un film sur Superman, un sur Batman contre Superman qui introduit Wonder Woman, puis un film sur Wonder Woman, un Suicide Squad qui met en avant les mĂ©chants de cet univers, et enfin un Justice League censĂ© convoquer tout le monde, Cyborg, Aquaman et Flash. Une stratĂ©gie dĂ©licate, surtout quand on sait que le grand public connaĂźt bien moins les hĂ©ros DC que les hĂ©ros Marvel, Superman et Batman mis Ă part. Alors bien sĂ»r, du point de vue de son rĂ©alisateur, il y a du sens. Avec son Superman trĂšs christique, il signe une trilogie calquĂ©e sur la vie du Messie : avĂšnement, mort et rĂ©surrection. Mais tout ne va pas se passer comme prĂ©vu.
Effectivement, aprĂšs le four critique de Batman v Superman â Ă peine rattrapĂ© par une version longue mieux dĂ©coupĂ©e donnant plus de sens Ă lâintrigue â on s'apprĂȘte Ă lancer le dĂ©jĂ vu. Tandis que comme dit plus haut les Avengers cassent la baraque, les grands patrons de Warner dĂ©cident dâarrĂȘter les frais. Exit ce ton et cette ambiance sombre et mortuaire. On ouvre les vannes aux blagues de situation et au diaphâ des camĂ©ras avec de la couleur partout et du montage calquĂ© sur des musiques pop ultra identifiĂ©es comme ça a dĂ©jĂ Ă©tĂ© le cas avec Suicide Squad. Justice League sortira, mais ne sera pas lâaboutissement du cycle dĂ©butĂ© cinq ans auparavant. Et surtout, il sera le point final du projet. Pas de suites, plus de DCEU, la coupe est pleine. Qui plus est, les contrats Ă©tant arrivĂ©s Ă leurs fins, il faut boucler tout ça avant la fin de lâannĂ©e fiscale mes amis. Les dividendes nâattendent pas !
Out of my League
Devant le refus de Zack Snyder de corriger en profondeur son sujet, le studio dĂ©pĂȘche sur les lieux un certain Joss Whedon, artisan du succĂšs Marvel. En plus des producteurs exĂ©cutifs qui ne le lĂąchent plus dâune semelle, Snyder se voit dĂ©possĂ©dĂ© petit Ă petit de son bĂ©bĂ©. Une situation compliquĂ©e qui va atteindre son apogĂ©e lorsquâun drame familial vient frapper le rĂ©alisateur : sa fille Autumn alors ĂągĂ©e de 20 ans met fin Ă ses jours. EffondrĂ© et usĂ© par un tournage compliquĂ©, Zack Snyder quitte le projet. Whedon poursuivra seul aux commandes, et tentera de tenir la barque Ă flot, appliquant sans broncher les directives de la Warner : soit Ă©ponger au jet d'eau. Une rĂ©ussite (non).
AprĂšs de multiples reshoots, le film sort en salles. Lâaccueil nĂ©gatif du public est retentissant, mĂȘme si une fois encore au niveau du box office, on reste dans une situation compliquĂ©e mais pas critique. Les fans se sentent flouĂ©s, ne reconnaissant plus lâambiance et les promesses des deux premiers opus. Les reviews moquent un film indigeste, sans queue ni tĂȘte, dĂ©bordant dâeffets spĂ©ciaux peu amĂšnes. Pire encore, le ton gĂ©nĂ©ral pourtant encore palpable lors des premiers teasers fait totalement dĂ©faut et des images trĂšs attendues sont tout bonnement absentes du cut final â une pratique bien plus courante quâon ne le croĂźt ceci Ă©tant dit.
Human League
Lâhistoire aurait pu sâarrĂȘter lĂ . Mais nous ne serions pas ici si tel Ă©tait le cas⊠Les mois passent. Justice League reste un accident comme il en arrive peu. Comme la trilogie du Hobbit ou Star Wars Episode VIII â dĂ©solĂ©, ce nâest pas de lâacharnement, mais dĂšs quâil passe Ă portĂ©e, il a droit Ă sa petite claque derriĂšre la tĂȘte pour lui rappeler sa condescendance et son irrespect. Infinity War et Endgame battent tous les records, ce dernier devenant le plus gros succĂšs de l'histoire du box-office mondial, avant d'ĂȘtre re-dĂ©passĂ© par Avatar il y a quelques semaines. Pendant ce temps, Warner est dâores et dĂ©jĂ passĂ© Ă autre chose, avec des films sĂ©parĂ©s et plus imbriquĂ©s dans un univers commun, entre un Joker plus intimiste, un futur Batman au casting incroyable, le reliquat d'Aquaman successful malgrĂ© ses faiblesses propres, quelques surprises avec des hĂ©ros plus confidentiels comme Shazam ou Black Adam ou une suite nanardesque Ă Suicide Squad : Birds of Prey. Mais câĂ©tait sans compter sur la rumeur, lâobstination des fans⊠Et un petit coup de pouce de Zack Synder.
Sans doute chauffĂ©s Ă blanc par le succĂšs de leurs cousins ayant rĂ©ussi Ă faire revoir sa copie Ă la Paramount sur le design de Sonic, une rumeur voit le jour. Elle est comme souvent issue de Reddit ou des forums US. Tout a commencĂ© par des fans se demandant Ă quoi aurait bien pu ressembler ce ratĂ© cosmique si Zack Snyder avait pu finir son film comme il lâentendait. Et mĂȘme qu'il existerait une version non rafistolĂ©e ! Oui oui oui. Et selon les dires dâemployĂ©s de la Warner et du cousin d'un ami technicien qui bossait sur le tournage de Justice League, Zack Snyder serait mĂȘme parti avec en poche un disque dur contenant sa version du filmâŠ
Harder, Better, Faster, Stronger
La lĂ©gende du Snyderâs Cut, le montage de Zack Snyder, en opposition au montage sorti en salles poussĂ© par Whedon et les studios, naĂźt. VĂ©ritable exutoire des fans, cette version idĂ©alisĂ©e et fantasmĂ©e serait Ă la fois grandiose et sans concession. La folie de #ReleaseTheSnydersCut inonde la toile. Je vous passe les dĂ©tails de la montĂ©e au pinacle des Ă©vĂ©nements, de ses dĂ©mentis et officialisation, pour arriver Ă la conclusion de cette histoire rocambolesque. Le Snyderâs Cut existait bien, et quand il fut question de le sortir, Warner a mĂȘme fini par accepter que le rĂ©alisateur termine son montage, avec reshoots, post-prod et remontage en bonus pour pas moins de 70 jolis millions. Excusez du peu. Sâil fut un temps question dâune sortie Ă©pisodique sur HBO Max, la plateforme de streaming de Warner, le Snyderâs Cut a fini par trouver sa voie en un film de quatre heures 100% Snyder-esque, pour le meilleur et pour le pire.
âWeâve come to it at last, the great battle of our timeâ disait Gandalf dans Le Retour du Roi. Et nous y voilĂ arrivĂ©s nous aussi, aprĂšs ce long cheminement. Comme lâami Zack, je porte avec moi le style qui me caractĂ©rise : cinq chapitres avant de parler vraiment du sujet du jour. Câest ma croix. Mes ralentis Ă moi. Alors arrivĂ© lĂ , que vaut-il ce Justice League nouveau ? Le Snyderâs Cut tient-il toutes ses promesses ? Est-ce le film ultime du DCEU ? Le chefâd'Ćuvre annoncĂ©, portĂ© aux nues par des fans ravis ? Snyder parvient-il Ă faire du Justice League abominable sorti en salles en 2017 un super film ? Sans surprise, oui et non. Merci dâĂȘtre restĂ©s jusque lĂ pour ça. Vous pouvez reprendre une activitĂ© normale.
Oops, I Did it Again
Non, plus sĂ©rieusement, on va essayer de regarder ça dâun poil plus prĂšs. Si comme mon ami Gauthier qui en a fait Ă©tat dans Le Petit Popcast vous ĂȘtes allergique au cinĂ©ma de Zack Snyder, cette version de Snyder-au-carrĂ© va vous faire pleurer des larmes de sang tant le style du rĂ©alisateur transpire de la pellicule. Ralenti sur ralenti, ralenti DANS le ralenti, camĂ©ra iconisante qui flatte les hĂ©ros DC comme des divinitĂ©s antiques, noirs collĂ©s et ciels sĂ©pias, le style du rĂ©alisateur est presque une parodie de lui-mĂȘme. Le coup du format IMAX imposĂ© en est mĂȘme le tĂ©moin : pas de concession.
Avec le recul, je dois avouer que jâai aimĂ© le traitement trĂšs BD de 300, ses ralentis qui alternent avec des accĂ©lĂ©rations subites, ou quand la sur-sophistication du visuel sert une imagerie mythologique. Jâai trouvĂ© intĂ©ressant ce traitement de la gravitĂ© dans son adaptation des Watchmen, mĂȘme si jâai regrettĂ© que le film sâĂ©loigne autant du bijou dâAlan Moore. Ce style surannĂ© et maniĂ©rĂ© est parfois devenu un peu lourdingue, notamment avec Sucker Punch. Le manque de demi-mesure aussi. Jâaime par exemple la camĂ©ra de Peter Jackson, mais quand il a des garde-fous. DĂšs quâil est seul maĂźtre Ă bord, ses vieux dĂ©mons lâassaillent encore, et je ne peux plus voir ses gros plans et ses blagues potaches. Il en est de mĂȘme pour Snyder. Avoir du style, une touche personnelle, câest bien. Mais se vautrer dedans jusquâĂ plus soif, ce nâest pas se rendre service.
In the Lap of the Gods
Si sur Man of Steel, Zack Snyder avait su trouver un certain Ă©quilibre, sa vision du DCEU est ici poussĂ©e Ă son paroxysme. Ă chaque plan, ses hĂ©ros iconisĂ©s semblent se regarder avant le bal de promo, rĂ©ajustant sans cesse leur nĆud pap'. DerriĂšre le masque, Bruce Wayne et consorts se prennent vraiment au sĂ©rieux et au final, le scĂ©nario gĂ©nĂ©ral reste le mĂȘme : une quĂȘte autour dâenvahisseurs aliens et de boĂźtes magiques Ă retrouver. Je vous spoil directement ; ce grand final sera mieux foutu mais on reste sur les mĂȘmes fondations.
Exit les reshoots signĂ©s Whedon, les blagues inutiles et ce ciel rouge dĂ©gueulasse qui irradiait du montage de 2017. Tous les rajouts voulus par le studio passent Ă la trappe, des rĂ©fugiĂ©s russes Ă la moustache masquĂ©e grossiĂšrement numĂ©riquement dâHenry Cavill. En lieu et place, Snyder pose les jalons de sa longue, trĂšs longue conclusion en un montage final de quatre heures dĂ©coupĂ© en six parties. Bien plus cohĂ©rente, cette version remplit son office et se pose en clĂ© de voĂ»te des bases plantĂ©es par Man of Steel et Batman v Superman. Le vilain du film est le hĂ©raut dâun super vilain â un peu comme Loki et Thanos dans Avengers 1 et 3 â et le scĂ©nario prend sa source aux temps antiques, mĂȘlant mythes du passĂ© et invasions extra-terrestres. Un ensemble tout-Ă -fait acceptable selon les dĂ©fenseurs de la thĂ©orie des anciens astronautes (sic.) mais qui rajoute une surcouche Ă un planning pourtant dĂ©jĂ bien chargĂ©, avec pas moins de trois hĂ©ros Ă prĂ©senter et au groupe de se trouver. Ah oui et un Superman Ă ressusciterâŠ
Ă la faveur de lâautomne
Je pose quelques instants le ton cynique que jâai adoptĂ© ces derniers paragraphes. Sâil est loin dâĂȘtre parfait et quâil reste bien lourd dans lâensemble, ce Snyderâs Cut ne dĂ©mĂ©rite pas pour autant au vu du chantier. Toutes ces intrigues intriquĂ©es et cette complexitĂ©, il parvient Ă les dĂ©velopper sans perdre son spectateur. Certes, câest diluĂ© et rĂ©guliĂšrement engoncĂ© au milieu dâeffets visuels discutables â c âest moi oĂč tous les mĂ©chants en CGI du DCEU sont fonciĂšrement moches ? â mais ça a au moins le mĂ©rite de tenir la route. Les nouveaux hĂ©ros ont chacun leur moment fort et leurs personnalitĂ©s ne sont pas laissĂ©es pour compte. On comprend bien mieux les motivations, les doutes et les errements de chacun, et dans lâensemble lâappel du pied Ă de grands moments des comics fait plaisir Ă voir, Ă lâimage de ce costume noir de Superman.
En alternant les phases dâexplications, de dialogues, les moments intimistes et les scĂšnes dâaction, Snyder accouche dâun montage certes long mais paradoxalement bien plus digeste que la version charcutĂ©e de 2017. Il y glisse en fil rouge ses propres traumatismes et se sert de ses hĂ©ros pour dĂ©passer ses dĂ©mons. En insufflant une vraie dimension cathartique Ă lâensemble â le film sâachĂšve sur une reprise de l'Hallelujah de Leonard Cohen tandis que la mention âdĂ©diĂ© Ă Autumnâ sâaffiche Ă lâĂ©cran â, il parvient malgrĂ© tous les dĂ©fauts pointĂ©s Ă toucher au cĆur celui ou celle qui aura dĂ©cidĂ© de finir le chemin en sa compagnie. Comme on lâa dit, le film est sans doute trop long et aurait gagnĂ© encore en fluiditĂ© en sâaffranchissant de pas mal de sĂ©quences dispensables.
La Ligue des Gentlemen Extraordinaires
La raison de ces ajouts ? La dĂ©cision de la Warner, Ă date âirrĂ©vocableâ, de ne pas pousser plus avant la rĂ©habilitation du DCEU signĂ© Snyder. En effet, il devait y avoir deux suites Ă ce Justice League. Sans doute son architecte ne voulant pas tout voir disparaĂźtre, il poursuit une mĂ©canique de rĂȘves prĂ©monitoires initiĂ©e dans Batman v Superman et semble crier Ă qui veut tout au long du film âRegardez ! Jâavais prĂ©vu ça sur les suites ! CâĂ©tait bien hein ? On lancerait pas un petit #ReleaseTheSnyderVerse les copains ? Ăa a marchĂ© la premiĂšre fois !â Bien Ă©videmment, cet appel du pied est un peu facile. Car jamais en 2017 le Justice League hypothĂ©tique de Zack Snyder nâaurait Ă©tĂ© Ă l'image de cette version totale et nâaurait durĂ© 4h tout en Ă©tant aussi marquĂ© et empennĂ© de la marque de son auteur.
Mais au-delĂ de ces rĂ©flexions, le projet en question des Justice League 2 et 3, non content dâinviter de nouveaux personnages comme le Martian Manhunter ou Joe Manganiello en Deathstroke, aurait emmenĂ© tout ce beau monde vers une guerre totale contre DarkSeid. Une guerre qui se serait soldĂ©e par la dĂ©faite des hĂ©ros, avec la mort vraisemblable de Wonder Woman, dâAquaman, le changement de camp de Superman et la quĂȘte dĂ©sespĂ©rĂ©e de Batman dans un monde post-apocalyptique qui nâa rien Ă envier Ă celui de Mad Max ou de Ken le Survivant, dĂ©sert de sable inclus. Un monde terrible oĂč lâhomme chauve-souris serait obligĂ© de sâallier avec ses anciens ennemis comme le Joker et de compter sur Flash pour remonter le temps et corriger le tir. Comment ça ça vous rappelle quelque chose ?
Ă la Longue
Au final le Snyderâs Cut se pose comme le marqueur de son temps, quand toute lâindustrie est amenĂ©e Ă se repenser tandis que la crise du Covid accĂ©lĂšre encore la mise Ă genoux des exploitants et la mainmise des studios et plateformes de streaming sur la crĂ©ation. En rĂ©sulte une vision trĂšs personnelle et presque biblique qui prend le pas, plus que de raison sur⊠la raison. Câest dans lâair du temps, lâĂ©motion a pris le pas sur la rĂ©flexion. Il nây a pas non plus de mĂ©chant studio et de valeureux vidĂ©aste. Pas plus que de gardiens du temple derriĂšre leurs Ă©crans. Il y a seulement un film trop long mais chargĂ© dâhistoires.
Personnellement je ne me suis pas ennuyĂ© Ă la vision du Snyderâs Cut, et jâai aimĂ© observer cette rĂ©habilitation, voir les graines plantĂ©es en 2013 germer enfin, et su apprĂ©cier la proposition malgrĂ© ses effets un peu balourds. Jâaime avant tout la cohĂ©rence globale et ce final permet Ă son auteur de clore le travail qui lui avait Ă©tĂ© confiĂ©. Jây vois aussi une sorte de mea culpa du studio qui a conscience dâavoir engendrĂ© un monstre informe. Jâaurais dâailleurs aimĂ© voir Ă l'Ćuvre ce type de rĂ©flexion dans une galaxie lointaine â sans aller jusqu'au #ReleaseTheLucasSequelTrilogy !
Mais ne vous leurrez pas : de quelque maniĂšre que vous ayiez reçu le Snyderâs Cut, la sortie en grande pompe du film reste un coup marketing orchestrĂ© par la Warner avec lâaccord de Zack Snyder et du public. On y voit lâĂvangile cathartique de son rĂ©alisateur qui trouve lĂ une porte de sortie plus que bienvenue et une fin convenable Ă sa passion. Et ce, avec lâaval dâune foule Ă©paisse de fans qui agite par mimĂ©tisme ses rameaux, se rĂ©vĂ©lant au mieux satisfaite, et au pire se croit transfigurĂ©e comme comme un zĂ©lote en transe. Et avec votre esprit.