2023 arrivant à sa fin, il est temps de regarder dans le rétro pour dresser un premier bilan d'une année jeux vidéo particulièrement riche. Entre Baldur’s Gate 3, Spider Man 2, Zelda : Tears of the Kingdom, Street Fighter 6 ou Diablo IV, il est plus que temps de revenir sur ces titres qui ont marqué l'année, pour le meilleur comme pour le pire !
Pas de révolution technologique. Pas de sortie marquante de hardware. Pas de PS5 ou Switch Pro. 2023 reste l’année des IA, des consoles portables Android, du Steam Deck ou des catalogues riches et garnis de remakes tandis que la production s’affranchit enfin du cross-gen. Une année charnière après deux ans d’installation de machines de la génération actuelle et les conséquences de la pandémie. Le cloud gaming prend ses marques, les supports sont toujours plus dématérialisés, tandis que les services en ligne font peau neuve, et pas toujours pour le meilleur. Une année parfaite pour que les éditeurs dégainent tour à tour leurs hits, ce qui a donné un calendrier d’une densité rare. Or, derrière la rutilance de surface, l’ombre du plaqué or se fait sentir.
Les métiers du jeu vidéo sont à la peine. Les petits studios et les développeurs voient leurs conditions toujours aussi précaires, les journalistes spécialisés réduits à peau de chagrin, leurs médias absorbés par des vendeurs d’espace pub les obligeant à trouver des solutions alternatives, les boutiques ferment, incapables de tenir la dragée haute aux abonnements, et ce malgré les vraies limites de ces services en ligne tout-puissants qui n'hésitent pas à retirer du contenu à leurs usagers ou à en limiter l'accès du jour au lendemain…
Derrière le paysage chatoyant, le décor se fissure. Malgré un fort boost en France grâce aux avantages et crédits d'impôts qui permettent à des studios de se faire remarquer, l’industrie reste dans une mutation qui entraîne de nombreuses désillusions. D'un côté les grosses corporations n'en finissent plus de jeter des centaines de milliers – voire de millions – de dollars par les fenêtres, et de l'autre les artisans de l'industrie sont à la peine. 2023 est effectivement aussi le rachat d'Activision Blizzard par Microsoft. Le nombre d'acteurs diminue dans une logique d'absorption toujours plus décomplexée, avec les avantages et inconvénients qu'on imagine. Gardons-le en tête entre deux parties sur nos jeux de l’année. Car si de nombreux titres sont de véritables réussites, le crépi du secteur est toujours un peu trop frais sous la première couche.
Mais il faut en convenir, 2023 a su se distinguer par des propositions multiples et éclectiques. Aux jeux de 2022 reportés, on soustraira les jeux repoussés. Balle au centre en somme. Et plutôt que de parler de ce qu’on n’a pas eu, plongeons-nous sans attendre sur ce a quoi on a pu jouer cette année. Vous allez le voir, la liste, non exhaustive, reste conséquente.
Pleure-moi une rivière
Au risque de me répéter, j’ai adoré détester Zelda : Tears of the Kingdom. Adoré parce qu’ayant fait Breath of the Wild sans trop m’y attarder, j’ai pris de plein fouet toute la puissance de la proposition de Nintendo et d’Eiji Aonuma dans sa superior version. Certes, le coup de poing de la nouveauté est moins présent, mais Tears of the Kingdom pousse tous les curseurs de son aîné plus loin. Un peu comme Assassin’s Creed II ou Uncharted II en leur temps, parachevant les premiers volets qui les avaient vus naître. Tears of the Kingdom est une réussite. Un jeu total et organique dans lequel on prend un réel plaisir à se perdre. Mais il ne gomme quasiment pas les défauts de Breath of the Wild, et les boucles de gameplay, pour peu qu’on se soit vraiment investi dans le jeu, finissent par avoir raison de l’aventurier, qui redescend au statut de joueur dès qu’il lit les codes de la matrice. Quand bien même il parfait la copie de Breath of the Wild, ce Tears of the Kingdom sera toujours perçu comme une suite et n’aura jamais les lauriers déjà obtenus par son grand frère. En attendant une nouvelle réinvention de la saga, je pense qu’il se passera du titre de GOTY cette année.
En marge de Zelda, 2023 a été une année plutôt riche pour Nintendo. Si tous les fans de technologie (et les blasés des textures baveuses ou des portages des hits de la génération précédente) attendent en trépignant de vraies annonces autour d’une Switch Pro ou d’une nouvelle console, il faut avouer que Big N n’a pas chômé. Super Mario Bros. Wonder a remis en avant l’expérience 2D avec de vraies prises de risques. Pikmin 4 a sublimé le concept de sa série, piochant allègrement dans toutes les bonnes idées des trois jeux déjà sortis, tout en ajoutant sa propre pâte. Super Mario RPG n’a quant à lui pas hésité une seconde à reprendre la formule du tour par tour à l’ancienne pour se présenter sous une forme très respectueuse de la mouture originale de Squaresoft. Les joueurs et joueuses ont vraiment eu de quoi s’amuser sur Switch cette année ; et c'est sans compter sur le retour de Kirby dans Return to Dream Land Deluxe et un nouvel épisode de Fire Emblem bapstisé Engage. Des jeux sortis en tout début d'année qui permettaient d’attendre calmement les gros titres du calendrier de l'éditeur.
Modern Talking
Final Fantasy XVI a beaucoup fait parler au sein de l'équipe du Grand Pop. Qu’on adhère complètement ou qu’on soit plus timoré par la proposition de Naoki ‘Yoshi‑P’ Yoshida, il faut reconnaître que le jeu est bon. La prise en main est efficace, le système de combat confié à Ryota Suzuki (Devil May Cry) est nerveux et instinctif. La mise en scène est grandiloquente dans les phases d’action et rappelle les bonnes idées de jeux comme Asura’s Wrath ou God of War dans la démesure des affrontements. En délaissant les univers anachroniques hi-tech ou steampunk pour se concentrer sur de la Dark Fantasy aux forts accents de Game of Thrones, les équipes de Square Enix ont su créer une vraie identité au titre dans une saga qui se cherche pas mal depuis l’abandon de son gameplay original au tour par tour. Mais les choix drastiques opérés (un seul personnage, peu d’évolution de stuff ou de compétences, jeu 100% action, quêtes secondaires FedEX héritées des MMO) en font-il un vrai Final Fantasy ? À l’heure où Baldur’s Gate 3 signe sa différence avec une réinvention de ce même tour par tour et un plébiscite total du milieu, ce Final Fantasy XVI qui tue le père semble à contre-courant. Un bon jeu oui, mais un mauvais Final Fantasy. Peut-être que le présenter comme un spin-off plus que comme un épisode canonique aurait été de bon ton.
Cette année sinon, en attendant Final Fantasy VII : Rebirth, les inconditionnels de la série ont malgré tout pu se replonger dans les méandres du scénario de l’univers de FFVII avec Ever Crisis, une expérience mobile gratuite, ou profiter du suivi toujours aussi riche de Final Fantasy XIV, qui ne cesse d'affirmer sa place sur le podium des MMO réussis qui durent dans le temps.
Do it again
Cette année, Capcom a poursuivi la réhabilitation de sa série d’action phare. Et après le très réussi RE2 Remake et le plus feignant RE3 Remake, c’est le quatrième épisode, véritable pierre angulaire de la saga qui a droit à sa réinvention. Et comme le disait Flegmatic à la sortie du jeu, s’il ne marquera pas l’industrie comme l’original, ce Resident Evil 4 Remake reste une remise au goût du jour solide et efficace. La boucle est presque bouclée. Ne manque qu’un remake du premier volet et de Code Veronica pour avoir l’expérience Resident Evil complète, jouable à peu près dans un design uni, jusqu’au virage de Resident Evil VII et Resident Evil Village. Comment ça un épisode Zero ? Il n’a jamais existé Jean-Germain. Pas plus que cette déception que fut RE5 ou l’ignominie RE6.
Et cette année encore, les remakes étaient à la fête. Pour le meilleur et la préservation de propriétés culturelles, comme pour le pire et la traite des vaches à lait. Parmi les plus réussis, Dead Space a signé un retour horrifique honorable, boosté par les technologies actuelles, tandis que Metroid Prime permettait d’apprécier l’inventivité du jeu original à l’aune des vingt ans de jeu vidéo qui ont suivi depuis, ou que System Shock donnait du grain à moudre aux fondus de SF à la papa comme notre cher Sinethic. Et cette année encore, comme chaque année depuis trop longtemps, un remake qui revient comme le Beaujolais, avec son goût de noisette ou de banane a encore torpillé les tops des ventes. Comme tous les ans, les joueurs de FIFA ont eu leur dose, même s’il change de nom cette fois, car s’affranchissant de la licence officielle. EA Sports FC 24 – c'est son nouveau blaze – le remake annuel qui nous rappelle qu’il suffirait d’arrêter de l’acheter pour qu’ils arrêtent d’en proposer…
Entre ici, Baldur's Gate, toi et ton cortège superbe !
Attention, gros morceau. Pas en nombre de lignes ici, mais bien en tant que marqueur de l’industrie en 2023. Contre toute attente, dans un marché dominé par les AAA conventionnels et lissés (voir plus bas), il peut encore sortir des perles qui vont à contre-courant. Baldur’s Gate 3 est un roc dans le torrent de la production pasteurisée. Pas de loot box, pas de DLC, pas de backseat in-game intrusif, pas de difficulté absente ou faussement trop relevée, pas de zone bâclée pour tenir les calendriers, pas de concessions, pas de suivi de mode ou de tendance. Larian Studios a su s’imposer et revenir en grâce à force d’abnégation, d'honnêteté intellectuelle, de travail et de passion. Baldur’s Gate 3 est un monument a marquer au fer rouge : il transpire la passion côté production et a rencontré un plébiscite notoire côté public malgré son design entier et hors des sentiers battus. Il démontre que des jeux atypiques, originaux et absolus dans leur conception peuvent encore faire mouche. Baldur’s Gate 3 mérite le titre de GOTY par ce qu’il est et par ce qu’il raconte du jeu vidéo en 2023. Mais attention à ce qu’il ne soit pas gênant pour toutes ses qualités et prises de risque ; l’industrie pourrait aussi bien le saquer pour les standards coûteux qu’il pourrait induire à l’avenir.
Difficile de faire du RPG en comparaison cette année. Mais certains s’y sont risqués. Le hack’n slash très attendu Diablo IV n’aura eu que quelques semaines de vie médiatique pour exister, engoncé entre Zelda et Baldur’s Gate. Assez pour faire l’histoire et se rendre compte de choix de design surprenants. Honnêtement, qui joue encore au jeu aujourd’hui ? Allez‑y, levez la main. Bravo. Vous êtes deux. Cyberpunk 2077 a lui fait amende honorable après ses débuts catastrophiques. Une année importante pour CD Projekt RED, qui repartira bientôt du côté des Royaumes du Nord. L’ombre de The Witcher est de retour. Il était temps de sortir le DLC Phantom Liberty pour parachever l’expérience Cyberpunk et clore ce chapitre.
Des clics et des claques
Quand Street Fighter V est sorti, j’ai assisté depuis les premières loges à l’accueil du jeu par sa communauté. À l’époque, j’encadrais la rédaction d’un site de jeux vidéo et esport, qui avait ses propres équipes professionnelles. Notamment en Versus Fighting. J'ai vu la déception, puis l'obligation, et enfin la résignation. Lâcher un quatrième volet ultra dense et plonger dans des choix de game design peu amènes. J’étais plus loin cet été pour la sortie de Street Fighter VI. Mais encore assez proche des uns et des autres pour apprécier les retours des joueurs ou des commentateurs. Et ce Street Fighter VI, avec son ambiance ultra urbaine et hip-hop, ce n’est ni plus ni moins qu’une succession de bons choix. À chaque fois que l’équation du chaos pouvait venir ternir la campagne de lancement, la pièce est tombée du bon côté. Ce Street VI est non seulement un bon cru dès le départ, mais il intervient en plus dans un renouveau de la scène fight qui fait plaisir à voir pour l’amateur que je suis, comme un effet d’aubaine pour les joueurs et joueuses de tous niveaux.
Dans le genre, il faut absolument parler de Mortal Kombat 1. Comme avec Street Fighter, ce nouveau volet vient corriger le tir de l’épisode précédent, mal aimé de ses fans, comme nous l’expliquait RZA au micro du Grand Popcast. Cette nouvelle dynamique des jeux de combats n’a d’ailleurs pas fini de faire parler d’elle, puisque d’autres grands noms sont sur les starting blocks. Granblue Fantasy Versus : Rising, Projet L, Tekken 8 ou Dragon Ball Z Tenkaichi 4 sont en train de peaufiner leurs atours pour leur future sortie sur le ring et la baston s’annonce sauvage avec les Smash Bros. et autres King Of Fighters déjà dans la danse !
I'm a survivor
Du côté des jeux d’action-aventure, on a pu apprécier de (trop ?) nombreux titres. Malheureusement, la plupart d’entre eux seront abordés dans des parties plus acerbes de cet article. Toutefois, certains ont su tirer leur épingle du calendrier prolifique de 2023. Je repense en premier lieu à des titres déjà cités comme Final Fantasy XVI. Et je me redemande ce qu'il fait dans cette catégorie. Mon esprit vagabonde ensuite du côté de titres sortis il y a quelque temps mais que j’ai rattrapé cette année, comme Red Dead Redemption 2 ou Dark Souls 3. Puis je les sors de mon esprit, ils sont hors sujet ici, malgré leurs innombrables qualités.
Alors me revient Star Wars Jedi : Survivor, suite du sympathique Fallen Order sorti en 2021. Or, si le premier volet marquait son originalité grâce à un design soigné qui s’inspirait des meilleurs, cette deuxième aventure aux commandes de Cal Kestis est assez déroutante. Tout est mieux dans chaque aspect du jeu (sauf l’exigence très From Software-light des combats du premier jeu qui est passée à la trappe) : exploration, pouvoirs, environnements, sensation de puissance, graphismes, enjeux, scénario… Mais l’ensemble est moins cohérent, moins abouti. Un paradoxe oui, mais un paradoxe qu’on parvient facilement à mettre de côté si on est un tant soit peu fan de l’univers : faire des moulinets qui font VROOMB VROOMB et repousser des Stormtroopers par télékinésie reste une valeur sûre qui prend le pas sur l’objectivité.
Certains et certaines s’insurgent sans doute déjà. Quoi ? Et Spider Man 2 dans tout ça ? Il est même nommé aux Game Awards et en lice pour le GOTY ! C’est vrai. Mais n’ayant pas pu le tester dans de bonnes conditions, je me sens plutôt mal placé pour en parler ici, n’étant pas en mesure de le comparer à ses pairs. Il en va de même pour Alan Wake 2 d’ailleurs. Il n’en demeure pas moins que selon mes confrères journalistes, l’expérience semble pour l’un comme pour l’autre des plus satisfaisantes. Ce sera pour moi dans les rattrapages de 2024, quand les prix auront baissé.
De leur côté, les Souls-Borne se sont sentis pousser des ailes dans une année sans titre majeur chez From Software. Mais vous connaissez ma passion pour les roulades en slip… Lies of P invitait à la rentrée le genre dans une réinvention plutôt plate de Pinocchio, et Lords of the Fallen faisait sensation un mois plus tard en redorant le blason d’une série oubliée et enterrée. Puisant dans les logiques des meilleurs titres du genre, le jeu de Hexworks n’est pas exempt de qualités et se démarque même grâce à une mécanique de double-monde inspirée.
Vive la France !
Changement d’orientation, on va maintenant regrouper un peu les titres par logique d’ensemble au vu de la liste prolifique des sorties de l’année. Pour aborder la French Touch, l’instant Cocorico, la production française qui a le vent en poupe ces dernières années, je voulais surtout mettre en avant deux titres. Dans le cadre d’un épisode du magazine Multijoueurs, diffusé chaque semaine sur BFM / Tech&Co et animé par Mélinda Davan-Soulas, j’ai eu le plaisir d’en débattre avec Olivier Bénis de France Inter, et nos chouchous sont les mêmes. On retrouve le Jusant de Don’t Nod, poussé par Xbox via son Game Pass. Jeu engagé s’il en est sur le réchauffement climatique sous des allures de petit jeu de grimpette, le titre est particulièrement prenant tant son univers énigmatique pousse à l’investigation. Une narration environnementale très juste pour une allégorie forte.
L’autre incontournable, c’est Chants of Sennaar, du studio toulousain Rundisc. Dans une esthétique très inspirée des grands auteurs de la BD de SF comme Moebius, Jodorowsky ou Bilal, le jeu reprend le concept biblique de la Tour de Babel, pour proposer une série d’énigmes et une quête du décryptage des langues assez incroyable. Votre avatar sera le chaînon entre différents groupes qui ne se comprennent pas et devra être ce lien entre les peuples, émissaire anonyme du vivre ensemble. Tout un programme.
Petits mais costauds
Dans les mêmes logiques de développeurs indépendants, dans ou hors de l’Hexagone, plusieurs studios ont aussi su se faire remarquer et proposer des jeux qui rayonnent au-delà de la marée 2023. Les jeux indépendants ont longtemps été la friche à l’inventivité, et même si on assiste à une standardisation des titres par endroits, certains ont encore à cœur de sortir des sentiers battus.
C’est le cas de Cocoon, un jeu de casse-tête dans l’infiniment petit, avec son cyborg insectoïde et ses graphismes tout en rondeur, de Tchia, fable écolo mettant en avant les cultures et traditions de Nouvelle-Calédonie, de Dordogne qui met en valeur le département éponyme dans une aquarelle vivante paisible ou de The Wreck, un jeu narratif, français lui-aussi, 100% label Flegmatic, hélas passé complètement sous les radars. L’indé se fait remarquer aussi avec des mises en avant d’héritages digérés. Car l’âme d’un certain Chrono Trigger n’est pas très loin du Sea of Stars sorti cet été, même s’il n’en n’a pas l’ampleur ; et celle de Lovecraft est, elle, aussi bien présente dans le Dredge du printemps dernier, qui vous mettait aux commandes d’un bateau de pêche perdu dans un archipel étrange. De vrais titres marquants que je ne peux que vous conseiller d’essayer entre deux parties de vos AAA formatés.
Mentions honorables
Il en faut toujours. Qu’ils soient seconds couteaux passés à côté du succès à cause d’un plus gros qui a fait de l’ombre ou parce que sympathiques mais moins aboutis que d’autres, ils seront les oubliés de l’histoire. Entre ici le Avatar, Frontiers of Pandora qui sort la semaine de publication de cet article dans un silence assourdissant, entre l’annonce de GTA VI et les Game Awards. Un timing parfait signé Ubisoft.
Mais il y aussi de vraies perles. On aurait aimé qu’ils trouvent mieux leur public, mais sont tellement de niche qu’on ne leur reconnaît qu’un succès d’estime. Armored Core VI : Fires of Rubicon de From Software, Like a Dragon : Ishin !, noyé dans les sorties et ressorties de la série Yakuza, Hi-Fi Rush et son gameplay de beat’em all rythmique ou Planet of Lana ont marqué l’année. Mais peut-être moins que d’autres.
Ils nous ont déçus
L’année 2023 du jeu vidéo est aussi saupoudrée de jolis ratés. Qu’ils soient partiels ou complets, de grands noms sont passés à côté de leur sujet cette année. Je pense à Assassin’s Creed : Mirage, qui copie aussi les errements des jeux dont il s’inspire, pour accoucher d’un résultat branlant, daté, incomplet et dispensable, même à prix réduit. On pense à Starfield, le pétard mouillé de l’année. En même temps, plus la date de sortie se rapprochait et plus ce qu’allait être le titre au final ne laissait que peu de place au doute. Todd Howard a (encore) eu les yeux plus gros que le ventre et le comparo avec Baldur's Gate 3 sorti à peine un mois avant fait très mal. Call of Duty : Modern Warfare III s’est révélé être une honte. Même les Jean-Germain bas du front qui ne jouent pas aux jeux vidéo mais uniquement à KOLOF’ ont chouiné. Il est loin l’héritage des fondateurs d’Infinity Ward !
Question. Quelqu’un a‑t-il cru une seule seconde dans le potentiel de Forspoken ? Je veux dire, à part du côté des gros PDG de chez Square Enix ? Hein ? Non non, rien à ajouter de plus. Oui, si, c’est bien sorti. Oui cette année. Entre le fromage et le dessert. Ce sera notre prochain chapitre d’ailleurs. Mais avant ça, je ne résiste pas à l’envie de rappeler combien The Last Case of Benedict Fox est une déception, et de m’attarder – rapidement – sur deux cas d’école.
Dans le coin droit (bien à droite) on retrouve Immortals of Aveum. Un FPS qui troque les gros guns pour des pouvoirs magiques qui… qui tirent comme des gros guns. On pouvait enfin proposer autre chose, mais non. On a préféré rester dans la plaine de la médiocrité. Encore un shooter qui fait piou piou mais avec des lasers de couleurs flashy plutôt qu’avec des semi-automatiques et des grenades. Vous espériez que le caractère ‘magique’ de l’ensemble ne permette des effets pyrotechniques imaginatifs et encourage une sensation de puissance accrue ? Que nenni. Vous aurez Jean-Claude, rasé sur les côtés et tatoué, avec son look de hipster has been tout droit sorti d’un mauvais remake de Saints Row. Offrez-le à vos ennemis.
Et je me dois de laisser une bafouille, magique elle aussi, pour Hogwarts Legacy : l’Héritage de Poudlard, dans le coin gauche. Bien gauche lui aussi. En un mot, les fans d’Harry Potter méritent mieux. Ceux du Seigneur des Anneaux aussi – on ne parlera pas de cette infâmie qu’est le Gollum de Daedalic Entertainment – mais c’est une autre histoire. Cet Hogwarts Legacy est en quelque sorte bien pire. Il est assez correct pour vous faire croire qu’on est d’accord avec le fait de se contenter de ça. Un jeu moyen partout, techniquement acceptable, aux mécaniques déjà vues, aux combats brouillon et à l’exploration infantilisante. Enlevez-lui le skin Harry Potter et personne n’en aurait parlé. Je veux bien entendre qu’un fan de l’univers y trouvera son bonheur, mais chers fans, vous méritiez mieux. Au moins un jeu du niveau de Jedi Survivor : pas original mais bien fait. Laissez-le dans la pensine, délestez-vous de votre peine. C’est pour moi.
À peine sortis, déjà oubliés
On l’a dit. Et redit même. 2023 a été une année très riche. Le revers de la médaille c’est que dans ce tourbillon médiatique de sorties et d’annonces, plusieurs titres, très bons au demeurant, sont passés complètement sous les radars de la plupart des joueurs et des joueuses. Counter-Strike 2 est sorti dans l’indifférence totale, sans avoir été annoncé. Les joueurs pro ont swap de jeu, les hardcore ont parfait leurs stratégie dessus, mais c’est passé comme on change de roue. Personne n’a vu la différence ou n’en a parlé en dehors des cercles fermés des milieux autorisés.
L’une des séries de référence du STR a aussi connu un nouveau volet en début d’année. Qui se souvient de la sortie de Company of Heroes 3 ? Dans le même ordre d’idée, City Skylines II, Wo Long : Fallen Dynasty, Party Animals, Sonic Superstars, Flashback 2, Dead Island 2, Atomic Heart, Payday 3 ou Octopath Traveler II ont bien tenté quelque chose. Comme avec les courriers promo de votre assurance, les enveloppes sont restées fermées dans le pot de trucs à l’entrée. Mais si vous savez, le bol à la con où il y a les piles usagées, des clés d’on-ne-sait-plus-quelle-porte, un fond de paquet de Tic-Tac, des pièces de monnaie étrangère ou en Francs, deux trois tickets de caisse élimés et un bout de figurine cassée. Ce pot-là.
Et l’an prochain ?
2023, un millésime particulier ? Sans doute. Cette année a vu défiler des titres marquants et prenants qui ont su capter l’attention des joueurs et joueuses de manière évidente. Tant côté blockbusters que côté indé, tant dans l’innovation consciente que dans les productions les plus consensuelles, chacun et chacune y aura trouvé son compte. Comme on dit, on a bien mangé. Toutefois, beaucoup de titres qui ont fait 2023 sont des remakes ou des suites. Ou reprennent des cahiers des charges éculés, bien brossés au RTX pour faire étinceler les mirettes des technophiles faciles à berner. Mis à part quelques raretés exemplaires comme Hi-Fi Rush, Chants of Sennaar, Jusant ou Baldur’s Gate 3 pour ne citer qu’eux, la tendance est à un certain conformisme, mais de qualité.
Conformisme dans le fond ou dans la forme, mais conformisme quand même. On ne réinvente pas une grammaire chaque année. Mais conformisme de qualité a‑t-on dit. Et il faut le souligner. Si ce panel 2023 ne brille pas par son originalité, il a malgré tout pour lui d’afficher des jeux réellement bons. Et cette tendance semble déjà se profiler à l’horizon 2024. Parmi les titres les plus attendus, on retrouve des suites, des DLC et des remakes : Final Fantasy VII Rebirth, Hades II, Persona 3 Remastered, Hollow Knight : Silksong, Star Wars Outlaws, Tekken 8, Death Stranding 2, Dragon’s Dogma 2, Silent Hill 2 Remake, Elden Ring : Shadow of the Erdtree, Fable, MGS Delta : Snake Eater, Prince of Persia : The Lost Crown, Hellblade II : Senua’s Saga… La liste est longue, mais malgré tout prometteuse. Le paradoxe perdure.
2024 sera l’année de ces titres, mais aussi celle des Black Myth : Wukong des The Plucky Squire ou des Rise of the Rônin qui font le pari de nouvelles IP. Sans compter sur les surprises encore inconnues ou les arlésiennes comme Metroid Prime 4, le nouveau projet de Fumito Ueda et bien d’autres projets dormants. 2023 s’achève dans quelques semaines et malgré mes centaines d’heures sur Zelda : Tears of the Kingdom, Diablo IV, Final Fantasy XVI ou d’autres, le jeu qui m’a le plus marqué, Red Dead Redemption 2, date de 2018, au coude à coude avec l’excellent Baldur’s Gate 3, grand favori des Game Awards. Et vous ? De quoi a été faite votre année jeu vidéo 2023 ?