Moi, ma grande passion, c'est la baston. Mais plutôt que de garder cela pour moi, j'essaie de faire en sorte que de plus en plus de personnes s'y intéressent. Bien sûr, cela passe par des tests… mais aussi quelques explications basiques.
On compare souvent les jeux de combat aux échecs. Si la comparaison a des défauts, elle reste juste pour une chose : il faut savoir analyser l'adversaire bien sûr, comme j'ai tenté de l'expliquer dans une vidéo à la sortie de Dragon Ball FighterZ, mais aussi savoir parfois revenir aux fondamentaux.
Pour mieux comprendre ce qui fait le sel de ce genre qui m'est cher, et peut-être même vous aider à passer au niveau supérieur, je vous propose d'analyser la manière de défendre dans la plupart de ces jeux, et l'impact que la garde a sur le gameplay général du titre.
La garde, c'est arrière : Street Fighter V, Samurai Shodown
"La garde, c'est arrière" dit bien souvent Ken Bogard, et c'est effectivement le cas sur la plupart des titres du Père du Versus Fighting : Capcom. Street Fighter II ayant influencé de nombreux jeux par la suite, puisqu'il a créé le genre, cette garde directionnelle se retrouve aussi chez certains concurrents comme SNK.
La garde directionnelle implique une relativité à l'adversaire : s'il vous fait face, vous devez aller à l'opposé de sa direction. S'il vous passe par dessus, vous devez donc inverser celle-ci pour vous protéger. De plus, vous pouvez être debout ou accroupi, créant de nouvelles zones à garder. C'est donc la garde la plus complexe à réussir, puisqu'elle définit 6 zones différentes sur votre personnage qu'il vous faut prendre en compte, sans parler de la chope qui brise ce rythme.
Les coups "High" (haut) vont donc briser votre garde accroupie, quand les coups "Low" (bas) briseront votre garde debout. Les coups "Mid" (milieu), eux, ne vous toucheront que si vous n'allez pas dans la direction opposée de l'adversaire. Mais plus encore, les coups Mid ont tendance à avoir d'autres avantages, comme une distance accrue ou des capacités spéciales (un projectile par exemple), ou à n'être utilisés qu'au milieu d'un combo.
Mais surtout, cette multiplicité de points de touche permet une chose : la variété de l'approche d'un combattant. En défense, les jeux ayant cette mécanique à plusieurs points verticaux et horizontaux auront donc plus tendance à vous demander de réagir à ce que l'adversaire tente d'exécuter. Votre main gauche est réclamée autant que votre main droite, quand votre attention se doit d'être toujours à son maximum.
Devoir aller en arrière pour se défendre force aussi un autre handicap sur le joueur : il n'est pas possible d'avancer vers l'adversaire facilement. Dans ces jeux, sauter est se rendre vulnérable. Avancer vers l'adversaire est se rendre vulnérable. Appuyer sur un bouton est se rendre vulnérable. Cette vulnérabilité fait que l'on va naturellement faire beaucoup plus attention au placement de son personnage, avancer pixel après pixel, par à‑coups ; relâcher sa garde pour attaquer n'est jamais une décision prise à la légère. Lever sa défense demande une exécution plus complexe.
C'est cette garde qui influence la plus grande importance de ce que l'on appelle les "footsies", le jeu de placement de son personnage, sur ces titres. Street Fighter V en est un bon exemple, puisqu'en simplifiant ses combos et en rendant les coups lourds massivement punissables, il a naturellement fait revenir l'attention sur le placement et la garde. Pas étonnant donc qu'une technique aussi simple que le "shimmy", le fait d'avancer et reculer très rapidement pour que son adversaire fasse une chope dans le vent et la punir, soit aussi populaire sur le titre.
Le prochain Samurai Shodown, que nous testerons sur Le Grand Pop, en est également friand. Le jeu porte toute son attention sur cet aspect de son gameplay, au point que le moindre de ses enchaînements (très simples au demeurant) peut arracher la moitié d'une barre.
La garde, c'est en l'air : Dragon Ball FighterZ, Marvel VS Capcom
Certains jeux, comme Dragon Ball FighterZ ou Marvel VS Capcom Infinite, rajoutent une nouvelle dimension à l'exemple vu ci-dessus : la garde aérienne. On reprend les mêmes principes que les jeux précédents, mais y ajoute la possibilité de pouvoir se protéger en l'air, faisant que son personnage n'est pas totalement ouvert lors d'une approche.
Simple, n'est-ce pas ? Mais alors, pourquoi ces jeux sont drastiquement différents ? Exactement pour ce simple fait de pouvoir sauter et se protéger. Puisqu'il est impossible de définir des coups High ou Low en l'air, toutes les attaques sont traitées comme des Mid et seul le positionnement compte encore dans l'espace aérien. De ce fait, d'un pur point de vue de force : mieux vaut être en l'air.
Quitte à être en l'air avec une garde excellente, autant aller vers l'adversaire. C'est pourquoi ces jeux sont généralement plus agressifs et rapides dans leurs manières d'approcher un duel : les combattants sont instinctivement poussés à sauter vers leurs adversaires. Le match va naturellement beaucoup plus s'orienter non pas sur le placement, mais la capacité à mixer entre High et Low, devant et derrière, et presser son adversaire pour qu'il doive rester en garde et subir son assaut. La force d'un personnage sera donc plutôt sa capacité à "mixer" au sein d'un même combo, en faisant s'enchaîner rapidement High et Low et en changeant rapidement de direction la garde de l'adversaire.
Vous vous demandiez pourquoi les joueurs avaient tendance à sauter de quelques pixels lorsqu'ils étaient pressés en garde sur Ultimate Marvel VS Capcom 3 ? Voici votre réponse : le personnage est considéré comme en l'air, il ne subit donc plus le jeu Low/High. Un avantage certain lorsque l'on est étouffé par la pression de son adversaire.
Si cette garde est particulièrement populaire dans les jeux à équipe cités plus haut, puisque ses autres membres permettront de plus facilement tenailler l'adversaire, le principe n'échappe pas aux duels plus standards. Ainsi, dans Persona 4 Arena Ultimax, on a la possibilité d'appeler son Persona pour des capacités spéciales remplissant généralement la même fonction d'extension, quand Guilty Gear Xrd permet d'annuler des actions pour plutôt jouer sur les feintes.
La garde, c'est bouton : Mortal Kombat 11, SoulCalibur VI
Restent alors les jeux de combat faisant le choix de mettre leur garde sur… un bouton. C'est là généralement que les joueurs habitués à l'école Capcom se perdent quelque peu, et c'est tout à fait compréhensible du fait de l'impact qu'a cette simple modification sur le gameplay.
Tout d'abord, il n'existe plus le même risque à mettre la garde que pour un joueur devant avancer en catimini. Ici, le réflexe de garde est beaucoup plus simple, puisqu'il ne s'agit que de penser à appuyer sur un bouton. Cela offre une bien plus grande liberté de mouvement : avancer n'est plus alors qu'affaire de réflexe face à une attaque ennemi. Il n'y a également plus de considération de devant/derrière, faisant que les développeurs peuvent plus simplement introduire des attaques se téléportant sur le terrain sans pour autant détruire l'équilibre de leur jeu : c'est notamment le cas de Mortal Kombat, dont le personnage emblématique Scorpion s'est toujours téléporté comme bon lui semble.
L'emphase est donc presque intégralement mise sur le jeu de High et Low. C'est pourquoi, très souvent, les personnages vus comme les plus forts de ces jeux de combat sont ceux pouvant faire beaucoup de dégâts ou créer des situations favorables à partir d'un coup High ou Low. La garde étant plus facile à avoir, le jeu de chope devient un peu plus proéminent dans la rythmique des matchs. La main gauche se repose bien plus que la main droite.
On remarque dans ces jeux qu'il est bien plus important de connaître sur le bout des doigts autant ses combos que ceux de ses adversaires. Connaître l'action devient plus important que d'y réagir, puisque certaines distances appelleront nécessairement certains combos et le mix up prévaut moins ; la punition est reine. Les combattants sont sur un pied d'égalité, et le jeu attend souvent d'eux bien plus d'être studieux que d'avoir une exécution parfaite. Le titre est donc plus accessible dans un premier temps, mais fait plus appel à la mémoire qu'à l'instinct en contrecoup, ce qui peut le rendre un peu plus rigide dans la forme.
Pour contrebalancer cela, d'autres mécaniques sont rajoutées. On notera d'ailleurs pour SoulCalibur VI le principe du 8‑way run, qui met en avant des déplacements sur 8 axes permettant plus de subtilités dans l'approche de l'adversaire. Cet outil supplémentaire n'est possible que grâce à la garde sur un bouton.
La garde, c'est temporaire : Super Smash Bros. Ultimate
Smash Bros. est-il vraiment un jeu de combat ? À cette sempiternelle question qui remue périodiquement les réseaux sociaux, nous répondrons bien évidemment… que oui. Et pour cause : en analysant sa structure de gameplay, on retrouve les mêmes principes liants tous nos titres entre eux.
La grande différence, et ce qui fait que Smash Bros. est bien souvent moins considéré que les autres, est que la garde est absolue. Elle ne peut être brisée que par une chope ou par les coups qu'elle reçoit, la bulle rapetissant plus ou moins rapidement selon la force des frappes et se régénérant avec le temps. De ce fait, il n'existe pas de notions d'avant, arrière, en haut ou en bas sur un combattant Smash : tous les coups sont pris en garde comme de vulgaires Mid.
Que faire alors pour l'ouvrir ? En contrepartie d'abord, une grande majorité de chopes peut mener à un combo ou à une situation spatiale très favorable. Car oui : puisque la garde est moins importante, les déplacements le deviennent naturellement beaucoup plus. Presser une garde n'a aucun intérêt sur Smash Bros., faisant qu'on cherchera surtout à faire en sorte que l'adversaire mette des coups dans le vent et être à une distance propice à le punir.
La capacité à se déplacer efficacement est ainsi la chose la plus importante à avoir. On remarque d'ailleurs que sur ce titre très particulier, qui a maintes fois été copié – big up PlayStation All-Stars Battle Royale – mais jamais égalé, la sélection du stage est aussi importante que la sélection d'un personnage. C'est une conséquence naturelle de cette simplification à l'extrême de la défense, et qui fait que Smash Bros. est un jeu de combat… de plateforme, en un sens. Presque un genre à part entière. C'est d'ailleurs pour cela que le fait de sortir le personnage de l'espace de jeu est primordial, la « vie » représentée par les pourcentages n'étant qu'un moyen d'atteindre ce but final.
Cette défense a aussi un impact sur les attaques que l'on retrouve en jeu. Puisqu'il n'existe pas de haut et de bas, l'intérêt des coups est intégralement lu selon la classe des Mid. On ne fera plus attention qu'à la distance qu'ils couvrent ou leurs capacités spéciales, le fameux projectile pris en exemple. Là encore, c'est un système simplifié mais dont la philosophie reste celle d'un jeu de combat dit « classique ». Fait amusant : puisque l'emphase est sur le déplacement plus que sur les coups, la main gauche travaille naturellement bien plus que la main droite.
La garde est votre amie
Évidemment, bien d'autres éléments influencent le gameplay final, faisant que chaque jeu de combat réussit à avoir sa spécificité le faisant sortir du lot. Tous ont toutefois en commun d'être majoritairement influencés par le type de garde qu'ils choisissent, qui permet en un clin d’œil de comprendre le ressenti général d'un jeu avant même d'avoir la manette en main.
Plus que tout, c'est donc un élément important pour passer du stade du simple débutant appuyant sur tous les boutons à celui du joueur cherchant à être compétitif. Comprendre la garde, c'est comprendre la philosophie du jeu de combat. Mais, avant toute chose : la garde, c'est la vie. Tâchez de ne pas l'oublier.
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